Eli qui habite Paris a commandé un Séfer Torah à Youval, sofer d’Achdod. Après avoir vu la belle écriture de Youval, Eli lui donne une avance. Le prochain payement sera fait dans six mois lorsque la moitié du Séfer sera déjà écrit. Six mois plus tard, Elie fait un voyage en Israël pour voir comment le travail avance. Mais Eli prétend être déçu : il s’attendait à une plus belle écriture. Il demande à Youval de trouver un autre client pour ce Séfer Torah. Youval n’est pas d’accord car il travaille depuis déjà six mois. Eli donne à Youval les 10,000 euros prévus selon leur accord, mais lui demande s’il peut continuer à travailler tout en cherchant un autre client, vu qu’il a beaucoup de demande. Youval refuse ; il finit son travail et demande à Eli les 12,000 euros prévus à la fin du travail. Youval reconnait avoir de la demande mais il préfère écrire un nouveau Séfer Torah pour ses prochains clients. Il prétend que ce Séfer Torah appartient déjà à Elie et c’est à lui de le revendre s’il le souhaite. De plus, Elie a signé un contrat stipulant que le parchemin acheté par Youval appartiendrait depuis le départ à Eli, de sorte que le sofer soit l’émissaire du client pour accomplir la mitsva d’écrire le Séfer Torah. Mais Eli refuse de payer les 12,000 euros restants. Il demande à Youval de vendre le Séfer Torah et de lui rendre l’argent qu’il a avancé. Le sofer et le client se retrouvent au beth dine pour régler ce litige.
Réponse : La question est de définir une commande. L’artisan devient-il mon employé que je n’aurai pas le droit de licencier en milieu de contrat s’il n’a commis aucune faute ? Ou bien doit-on considérer une commande comme une promesse de vente, pour laquelle je serai tenu de couvrir uniquement les pertes occasionnées par ma promesse ; et donc si l’artisan réussit à vendre le produit au prix convenu entre nous, je serai dispensé de tout payement ? C’est bien ainsi que le Choul’han Aroukh ‘Hochen Michpat (333 ; 8) considère une commande à un artisan. Mais le Netivot 15 et le Hazone Ich font dépendre cette halakha de la formulation de la commande : uniquement si le client lui a dit : « Fais-le je te l’achèterai ». Mais s’il demande à l’artisan de fabriquer pour lui un objet, l’artisan sera considéré comme son employé et l’acheteur devra le payer dès la fin de son travail. Il ne pourra pas lui dire : « Essaye de le vendre et je couvrirai tes pertes ». Le Mahara Sassone (rapporté par le Ketsot 339 ; 1) écrit que la loi dépend de la personne à qui appartient la matière première. Si elle appartient au sofer, le sofer travaille pour lui-même et n’a qu’une promesse d’achat de la part du client. Mais si son travail est effectué sur le parchemin du client, le sofer devient son employé depuis le départ. Dans notre cas, Youval a fait signer un contrat à Eli (contraignant, même s’il prétend ne pas comprendre l’hébreu ; Techouvot HaRachba) stipulant que Youval est l’émissaire d’Eli pour acheter le parchemin et écrire le Séfer Torah. Certains sofrim le font afin que leur client accomplisse la grande mitsva d’écrire soi-même un Séfer Torah et pas uniquement de l’acheter. Youval est donc devenu l’employé d’Eli et il mérite salaire selon les termes du contrat. A chaque jour de retard de payement, Eli transgresse l’interdit de béyomo titène sekharo.
En conclusion : Apres s’être assuré que l’écriture du Séfer Torah est semblable à celle de l’échantillon, le beth dine donne raison à Youval et oblige Eli à lui payer immédiatement les 12,000 euros restants avant de prendre son Séfer Torah.
Rav Réouven Cohen

La commande d’un Séfer Torah