Ouriel fait son aliya et décide de s’installer à Achdod. Il lui manque 200,000 shekels d’apport personnel pour acheter un appartement. Son frère David remue ciel et terre pour lui procurer cette somme. Il débloque son compte épargne qui lui rapportait 4,6% annuels, et contracte un prêt à sa banque en France ainsi qu’à sa banque en Israël. Ils s’étaient mis d’accord qu’Ouriel vire à David tous les mois le montant des mensualités prélevées sur le compte de David, intérêt inclus, ainsi que les 4,6% annuels que David touchait sur son compte épargne. Un an plus tard, Ouriel assiste à un chiour expliquant la gravité de l’interdit du prêt à intérêt entre juifs. Il se demande s’il n’y a pas d’interdit dans les versements d’intérêt qu’il fait à son frère. De son côté, David affirme ne tirer aucun profit de cette opération. Bien au contraire, il a endossé des responsabilités uniquement pour aider son frère.
Réponse : Le prêt à intérêt est sévèrement interdit par la Torah même s’il est fait pour rendre service à un proche. David et Ouriel doivent au plus vite établir un hétèr isska entre eux pour les prêts contractés à la banque en France. David devra aussi rembourser les intérêts encaissés d’Ouriel. Mais pour les prêts contractés à la banque en Israël, on pourra être plus indulgent.
hétèr isska : Un héèér isska pour un prêt existant est plus compliqué à établir. Il est de toute façon conseillé, pour établir ce document, d’être accompagné par un talmid hakham expérimenté dans ce domaine.
Développement : Le Choul’han Aroukh Yoré Déa’ (160,1) écrit : « Il faut faire attention à ne pas transgresser les multiples interdictions concernant le ribit. L’emprunteur qui paye les intérêts, le garant et les témoins transgressent eux aussi cet interdit. Quiconque prête à intérêt, ses biens s’effondrent et il renie en cela la sortie d’Égypte et le D. d’Israël ». Au paragraphe 8, le Choul’han Aroukh ajoute : « Il est également interdit de prêter à intérêt à ses enfants ou à ses proches ». Le fait de ne tirer aucun profit du prêt et des intérêts n’atténue pas l’interdit. David pourra demander à Ouriel de couvrir ses pertes – par exemple s’il a perdu ses intérêts acquis en clôturant son plan d’épargne – mais il ne pourra pas encaisser les intérêts futurs qu’il aurait pu gagner. Il en sera de même pour le prêt contracté à la banque. En effet, David est emprunteur vis-à-vis de la banque et prêteur vis-à-vis de son frère. Bien qu’il soit entendu qu’Ouriel couvre tous les agios, il n’a pas affaire à la banque. L’accord de prêt et de remboursement a été conclu entre lui et David. David a le droit d’emprunter avec intérêt à un non-Juif (la banque en France) mais il lui est interdit de prêter à intérêt à son frère. Ils doivent au plus vite établir un hétèr isska adapté à un prêt existant. Le dine sera différent pour le prêt contracté à la banque en Israël. En effet, dans toutes les banques en Israël, les prêts sont régis selon le hétèr isska, un contrat qui transforme le prêt en partenariat et qui permet de toucher un intérêt. En endossant toutes les obligations de David vis-à-vis de la banque, Ouriel adopte, sans même le savoir, vis-à-vis de son frère le mode de partenariat du héter isska. Ouriel pourra ainsi verser à David les intérêts mensuels (il est malgré tout recommandé d’établir un hétèr isska entre eux, même s’il s’agit uniquement d’un prêt d’une banque israélienne).
Rav Réouven Cohen