David a loué son appartement pour deux ans à son ami Ramy au prix de 6000 shekels par mois. Comme ils se faisaient confiance, David n’a pas demandé de garant. Mais au bout de trois mois, Ramy se retrouve au chômage et a du mal à payer son loyer. Il rassure David que c’est une difficulté passagère et lui demande d’attendre quelques mois pour être payé, le temps qu’il trouve un nouveau travail. Désireux d’aider son ami, David accepte mais demande qu’un garant signe sur le contrat. Avy accepte de signer comme garant. Quinze mois plus tard, David appelle Avy pour lui réclamer 90,000 shekels. Avy est stupéfait de cette somme énorme et refuse de la payer. Il prétend qu’il n’a jamais été d’accord de s’engager sur plus de deux ou trois mois de loyer. Selon lui, David aurait dû l’en avertir plus tôt, car il aurait alors fait pression sur Ramy de payer son loyer ou de quitter l’appartement. De plus, il dit à David que David n’a pas accepté ce locataire en s’appuyant sur sa garantie puisqu’il n’a ajouté sa signature qu’après trois mois d’occupation des lieux. David lui répond que si Ramy avait continué à ne pas payer, il se serait tourné vers le beth dine pour lui faire quitter l’appartement, mais puisqu’il avait sa garantie, il a laissé tranquillement son ami Ramy retrouver une situation stable et c’est justement la raison pour laquelle il a demandé un garant.

Réponse : David s’est abstenu de renvoyer Ramy de son appartement en s’appuyant sur la garantie d’Avy. Celui-ci devra respecter son engagement et payer les 90,000 shekels qu’il pourra par la suite réclamer à Ramy.

Développement : le Choul’han Aroukh ‘Hochen Michpat (129 ;1) écrit que celui qui se porte garant après que l’argent ait été prêté sera tenu de payer uniquement s’il y a fait un kinyan (acte d’acquisition). La raison de cette halakha est qu’un garant est censé payer seulement si le prêteur a compté sur sa garantie pour débourser l’argent, mais pas si l’argent est déjà passé chez l’emprunteur avant l’engagement du garant. Il faudra donc un acte supplémentaire (le kinyan) pour que cela engage le garant. Avy a donc raison de relever le fait qu’il a signé plus tard. Mais dans le cas qui nous intéresse, Avy doit malgré tout payer le loyer de Ramy puisque, sans sa garantie, David aurait fait quitter à Ramy son appartement. Cela ressemble à la halakha qu’un garant doit payer même s’il s’est engagé après l’emprunt lorsque le prêteur rend le gage car il compte sur la garantie (ibid. 3). De même, dans notre cas, David aurait pu renvoyer Ramy mais continue à lui louer son appartement car il compte sur la garantie d’Avy. Reste à savoir si Avy a raison de dire que David n’aurait pas dû attendre si longtemps pour lui réclamer la somme. Le Mayim ‘Hayim ‘Hochen Michpat 12 traite d’un cas semblable ; il écrit que le propriétaire est en droit de ne pas harceler son locataire et de lui laisser le temps de rassembler le montant des mensualités, puisqu’il a la garantie que la somme non payée par son locataire sera réglée par le garant. De plus, Avy s’est engagé à payer toutes les obligations de Ramy selon le contrat ce qui couvre bien plus que les mensualités (dégâts ou autres).

Rav Réouven Cohen

plus tard : Il faut noter qu’un grand nombre de décisionnaires considèrent la signature du garant comme un acte d’acquisition par force de sitoumta, l’usage de s’engager de cette façon. Ceci validerait de toute façon la garantie d’Avy. Cet avis étant controversé, j’ai préféré m’appuyer sur d’autres arguments qui valident cette garantie sans acte d’acquisition.

Ramy : La difficulté souvent occasionnée d’évacuer un locataire des lieux n’affectera pas le statut d’Avy de garant avant remise des fonds (‘arev lifnei matane maot). Voir ‘Hazei Haténoufa rapporté par le Beth Yossef ‘Hochène Michpat 129 au sujet d’une marchandise déjà détenue par l’acheteur à crédit avec lequel le vendeur a mis pour condition l’apport d’un garant. Celui-ci est considéré comme garant avant remise des fonds, puisque le statut juridique de la marchandise (achetée ou volée) dépend de sa signature. Il en est de même dans notre cas : Ramy étant en violation de contrat, il n’est plus considéré comme un locataire, mais comme un voleur. C’est grâce à la signature d’Avy en tant que garant que David restitue à Ramy ce droit de location qui suppose une dette mensuelle vis-à-vis de David.

La responsabilité d’un garant