annule-commande-cuisine-edcQuestion : David demande à son artisan, Chlomo, de lui faire une bibliothèque sur mesure. Chlomo achète le matériel et commence à travailler sur le projet. Après quelques jours David change d’avis et téléphone à Chlomo pour annuler la commande. Il s’assure auparavant que Chlomo n’a pas encore coupé les planches et qu’il peut s’en servir pour une autre commande. Toutefois Chlomo affirme en s’inspirant  d’un autre conflit avec un client réglé par un dayane qu’indépendamment de la perte de matériel, il y a un début de contrat avec commencement de travail et pour cette raison, David ne peut se rétracter.

Réponse : Il est vrai qu’un engagement avec un ouvrier est irréversible s’il a commencé à travailler. Dans le cas de Chlomo il a donc commencé à œuvrer sur le projet et même s’il n’a pas coupé les planches et il n’a été occasionné aucune perte de matériel, David devrait ne pas pouvoir se rétracter. Mais il faut savoir que parfois une commande chez un artisan peut se formuler de manière à ne pas vraiment engager. Quand par exemple on commanderait un gâteau etc. en promettant de l’acheter une fois fini et non en formulant les choses comme un contrat de travail. Un contrat de travail se dirait par exemple : ‘’fais cela et cela et je te rémunèrerais sur ton labeur’’. Alors qu’une promesse se dirait : ‘’ fais-le et je te l’achèterais’’.  Cette différence est commentée par Nétivote 333, 15 pour expliquer le dine énoncé par Roch (source de la halakha Hochen 333, 8). En effet selon Roch, quand on a dit à un artisan de faire quelque chose et qu’au moment où il le fournit on se rétracte, on doit quand même payer parce que sinon la chose va être jetée, comme dans le cas d’une denrée périssable etc. en vertu de dina dégarmi car on a occasionné une perte. Nétivote demande pourquoi seulement dans le cas d’une denrée périssable ? Ne doit-on pas payer un ouvrier pour la seule raison qu’il a travaillé à notre ordre et demande même si le travail a été effectué dans la rue etc. et que l’on n’en a pas jouit ? Il répond qu’ici la formulation est différente. Il n’y a pas eu de contrat de travail mais une promesse d’achat une fois l’objet fini. Cette promesse n’engage pas si ce n’est parce qu’elle a occasionnée une perte de matériel et d’énergie de travail (voire aussi Hazon Ich Baba Kama 23 ; 35).

De nos jours, même si la formulation n’est pas clairement comme une promesse d’achat, nous devons ainsi l’expliquer car c’est l’habitude de considérer les choses ainsi. La preuve à cela en est que même si la chose est accidentellement  endommagée chez l’artisan, on ne demande jamais à celui qui a commandé de payer pour le travail. Cela aurait dû être le cas, si l’on considérait l’artisan comme un ouvrier.

Le conflit  invoqué par Chlomo était différent. Il s’agissait d’un contrat avec un programmateur pour améliorer la qualité d’un site.  Il a donc travaillé sans fournir un nouveau produit. Dans ce cas, en commençant à travailler (‘hochen michpat 333, 2)  ou s’il y a eu début de paiement (Nétivote Id, 1), il y a obligation envers l’ouvrier  car on ne peut en aucun cas parler de promesse d’achat. C’est pour cette raison que Chlomo a dû payer dans ce cas les services du programmateur même après l’avoir arrêté en milieu de travail (selon un barème inférieur (de poèl batel)  puisqu’il n’a quand pas travaillé autant).

                                                                                                                 Rav Reouven Cohen

Vous aussi pour tous vos litiges contactez
TRIBUNAL RABBINIQUE POUR PUBLIC FRANCOPHONE
Pour toutes vos questions et arbitrage, Michpat Chalom:
Contact https://www.michpat-chalom.org/ouvrir-un-dossier/
Tel: 058 32 00 425

Victor, qui habite à Casablanca, essaye de temps en temps de sortir du Maroc une partie de sa fortune. II trouve un jour une idée originale : quand son voisin Pinhas prévoit un voyage en Israël, il lui demande d’emporter un gâteau pour son fils qui étudie à Jérusalem, en insistant qu’il le garde dans ses bagages à main. Pinhas accepte, sans se douter que Victor a introduit une dizaine de diamants dans ce gâteau à la crème… A l’aéroport de Casablanca déjà, après avoir passé le contrôle de police, en ouvrant ses bagages à main à la sécurité, Pinhas s’aperçoit que le gâteau s’est écrasé et qu’il risque de salir ses affaires. Il décide donc de s’en débarrasser et le jette à la poubelle, avec l’intention d’acheter au fils de Victor un bon gâteau à Jérusalem. Deux jours après son arrivée, il reçoit un coup de fil de Victor lui demandant où sont passés ses diamants. Pinhas ne comprend pas de quoi il veut parler et raconte à Victor que son gâteau s’étant écrasé, il l’a jeté dans une poubelle à l’aéroport de Casablanca. Atterré, Victor se met à hurler et exige que Pinhas lui paye le dégât qu’il lui a causé. Est-il en droit de le demander ?
Réponse : la Guémara Baba Kama 62a écrit : « Si l’on donne à une femme une pièce d’or à garder en lui disant : ‘Fais-y attention, c’est une pièce d’argent’ [pour qu’elle ne refuse pas de garder un objet trop cher] et qu’elle l’endommage, elle payera le prix de l’or. Mais si elle la garde négligemment [et que la pièce disparait], elle ne payera que le prix d’une pièce d’argent. » Pour la garde, la femme peut dire qu’elle ne s’est engagée qu’à garder de l’argent, et pas de l’or, mais pour le dégât, celui qui lui a donné la pièce peut lui dire : « Comment se fait-il que tu m’ais causé un dommage ? » En d’autres termes, le dommage n’est jamais excusable. D’après cela, Pinhas serait obligé de payer puisqu’il a volontairement endommagé le gâteau. Mais plus loin, la Guémara se demande si l’on fait payer le dommage à celui qui a donné un coup de pied à une caisse sans connaitre son contenu, quand le propriétaire prétend qu’elle contenait une pierre précieuse. La Guémara reste dans le doute dans ce cas, si bien que nous ne pouvons donc pas obliger celui qui a causé le dommage à payer le dégât. Les Tossafot écrivent que même si des témoins affirment que la boite contenait une pierre précieuse, l’homme qui a donné le coup de pied sera dispensé de payer puisqu’il n’est pas censé connaitre le contenu précieux de cette boite (alors que pour la pièce d’or, il fallait se douter qu’il avait menti pour avoir l’accord de la femme de garder sa pièce). Le Rama (‘Hochen Michpat 386 ; 1) a retenu l’avis des Tossafot. Mais le Choulhan Aroukh (ibid.) rapporte les propos du Rambam qui laissent penser que c’est uniquement par manque de preuve qu’on est exempt de payer, mais des témoins ou un serment de la victime du dommage obligent le responsable du dommage à payer la valeur de la pierre précieuse contenue dans la boite. Mais le Chakh (4) considère que le Rambam aussi partage l’avis des Tossafot, ce qui dispenserait Pinhas de payer dans notre cas, puisqu’il n’était pas censé imaginer que le gâteau qu’il devait transporter contenait des diamants. De plus, il me semble qu’il existe une raison supplémentaire de le dispenser du remboursement : ce gâteau pourrait être considéré comme un « rodéf », quelqu’un qui s’apprête à tuer son prochain. Le Choul’han Aroukh (380 ; 4) écrit qu’en cas de tempête, il est permis de jeter à l’eau les biens d’autrui qui alourdissent le bateau et mettent en danger la vie des passagers ; c’est même considéré comme une mitsvah. Ces bagages du bateau ont un statut de « rodéf » car ils mettent les passagers en danger. Il semble qu’il en est de même pour ce gâteau car si Pinhas se faisait arrêter à la douane marocaine, il risquait fort la prison. Or d’après les poskim, l’incarcération, surtout dans certains pays, est considérée comme pikouah néfech, un danger de mort. Dans ces circonstances, Pinhas aurait eu le droit de se débarrasser de ce gâteau s’il avait su ce qu’il contenait.
Conclusion : Pinhas ne sera pas tenu de payer à Victor quoi que ce soit.
Rav Rèouven Cohen

imgBanHautQuestion: Jonathan et Batiah ont loué un appartement meublé à Jérusalem pour une mensualité de 3200 shq. Comme ils ont des petites rentrées, mais désirent quand même passer les fêtes de pessah en France chez leurs parents, ils pensent sous-louer leur appartement pour 5200 shq. Dans le contrat de location il n’est pas mentionné d’interdit à ce sujet, mais est-ce permis selon la halakha sans le consentement du propriétaire?

Réponse: il faut bien vérifier que le contrat ne porte pas une clause pareille car elle apparait normalement dans tous les contrats standards. Dans ce cas, le choulkhan ‘Aroukh 316 s’appuie sur une décision de Rambam (hal. Sékhirout 5, 5) permet de sous louer à condition qu’on ne mette pas plus de personnes dans la maison. Ils pourraient en vertu de cela sous louer cet appartement.

Cependant, puisque cet appartement a été loué meublé, le propriétaire est en droit de s’opposer en prenant pour argument qu’il n’est pas permis de passer à quelqu’un d’autre la garde des objets mobiliers (comme l’explique le Rachba (rapporté par le Bet Yossef  316) parce qu’ils peuvent les faire disparaitre). Il peut donc dire  »il ne me convient pas de mettre mon mobilier sous la garde de ces gens que je ne connais pas ». (Voir à ce sujet Emek Michpat Sékhirout Batim 56).

Et puisque c’est interdit de sous louer, on devrait donc appliquer la règle énoncée dans le Rama (363,10) qui dit que la différence entre les loyers revient aux propriétaires, s’ils ont enfreint la halakha en louant. Jonathan et batiah devraient donc remettre au propriétaire 2000 shq (en déduisant toutefois les frais d’eau et d’électricité des occupants  etc.). Mais puisque cet avis du Rama est remis en question par le Ma’hané Efraïm (hal. Sékhirout 19), on ne pourra obliger les locataires à verser la différence aux propriétaires.

                                                                   Rav Reouven Cohen

TRIBUNAL RABBINIQUE POUR PUBLIC FRANCOPHONE
Pour toutes vos questions et arbitrage, Michpat Chalom:
Contact https://www.michpat-chalom.org/ouvrir-un-dossier/
Tel: 058 32 00 425

clause-de-non-concurrenceQuestion: David est à la tête d’un commerce très prospère. Il a, pour arriver là, développer soigneusement ses méthodes relationnelles etc. Il est tenté de faire rentrer un partenaire qui serait aussi actionnaire mais il éprouve certaines craintes. En effet, si celui-ci, suite à un différent ou un conflit, venait à le quitter, il serait en mesure d’ouvrir un même commerce et lui faire directement concurrence. Il veut donc poser des clauses de non concurrence dans le contrat d’association. Existe-t-il un langage dans la halakha qui puisse prévenir tout préjudice dans un tel cas de figure?

Réponse: Il faut savoir qu’un  engagement qui n’est pas monétaire mais qui consiste simplement  à s’obliger à faire un acte quelconque est appelé par le Talmud (baba batra 3)  »kinyan dévarim », une acquisition sur des paroles. Cette formule est invalide et elle n’oblige en rien (choulhan aroukh 245). C’est pour cela que Divré Hayim (hochen michpat T1, 31 et aussi voir Erekh Chay 205) considèrent qu’une clause de non concurrence n’oblige pas celui qui s’y est engagé. Car dans notre cas c’est d’autant plus un  »kinyan dévarim » que l’engagement est de ne  »pas » faire quelque chose.

Mais certains décisionnaires trouvent des solutions à ce problème:

Rivach (280) considère que l’on peut s’engager à ne pas commettre certains actes et que ce n’est pas invalidé par la règle de kinyan dévarim citée auparavant. Il étaye cela par l’exemple de Moïse qui s’est engagé envers Ytro, à ne pas quitter la terre de Midiane, le jour où il prit pour épouse sa fille, Tsipora.

 Divré Hayim (hochen michpat T1, 31; rapporté par Minhat Itshak T6, 170); s’appuyant sur Mordékhaï (pérek hagozel),  établit  que la concurrence est une forme de dégât, certes, permise et non sanctionnée par la Torah, mais que l’homme peut se l’interdire à titre personnel, car il s’agit tout de même d’un dommage.

Selon Maharik 181, toute clause portée dans un contrat d’association engage dans la mesure où elle est considérée comme un dû pour ce qui a été perçu dans le cadre de l’accord. C’est donc vu comme une rémunération pour les parts ou les avantages distribués au moment de la signature.

En conclusion, il existe des moyens de se prévenir. Les nuances de langage étant très déterminantes, la rédaction du contrat devra être faite avec beaucoup de précaution par un Dayane.

                                                                                                         Rav Reouven Cohen    

Vous aussi vous avez une question ou un litige ? Contactez nous !
TRIBUNAL RABBINIQUE POUR PUBLIC FRANCOPHONE
Pour toutes vos questions et arbitrage, Michpat Chalom:
Contact www.Michpat-Chalom.com
Tel: 058 32 00 425

 

as031736Question: David, voulant entrer dans sa place privée de parking, y trouve une moto attachée à un poteau, qui l’empêche de rentrer aisément. Il décide de rentrer tant bien que mal, mais en manœuvrant aussi bien qu’il le peut, il casse le rétroviseur de la moto et en plus, endommage aussi son véhicule.  Shmouel vient le voir en lui demandant de lui réparer son rétroviseur, ce que David refuse. Au contraire, David lui demande de le dédommager pour  ses dégâts à lui dans la voiture.

Réponse: Le Talmud Baba kama (28, a) établit que celui qui entrepose ses cruches dans le passage de quelqu’un, ce dernier est en droit de passer normalement et de casser les cruches. Selon Tossafote, cela est vrai même quand il est possible de les ranger les une sur les autres et de se frayer un chemin. Mais puisque cela entraine un dérangement, il n’est pas tenu de le faire. Et c’est ainsi que Choulhan Aroukh 412établit aussi, (voir Sma’ qui met comme condition qu’il ne soit pas possible de contourner les cruches pour passer) qu’il est permis de passer normalement, même s’il doit faire ainsi des dégâts,  mais pas de les casser volontairement. La raison à cela est qu’il n’y a pas d’obligation de retourner un objet à son propriétaire quand celui-ci le laisse à la dérive et à sa perte.

Dans notre cas aussi, puisqu’il n’était pas possible de rentrer sans abimer le rétroviseur, il n’y a aucune obligation de la part de David de réparer ou de rembourser.

Par contre, la demande de David de réparer sa voiture sera aussi rejetée comme le souligne Choulhan Aroukh (id.), qu’il ne pourra pas demander au propriétaire des cruches quoi que ce soit s’il se blesse en les cassant pour passer.

Il est évident, cependant, qu’il n’est pas permis de trouer les pneus ou de faire un acte de vandalisme quelconque afin de donner une leçon au propriétaire de la moto. Par contre s’il constate que la moto est garée de manière continue dans son emplacement et qu’il ne prend pas au sérieux ses avertissements, il sera en droit de se prévenir (comme en mettant des clous etc.) afin de l’en empêcher (voir à ce sujet baba kama 83, a qu’il est possible en cas de danger de laisser un chien méchant chez soi même s’il est interdit en temps normal).

Rav Réouven Cohen

agent-immobilierQuestion : Eli, un touriste français, de passage en Israël, rencontre une ancienne connaissance, Acher,  lui, installé à Ashdod depuis longtemps. Il lui fait part de son projet de s’installer dans cette même ville et il cherche à cet effet, une maison privée. Il lui décrit le bien qu’il souhaiterait acheter. Acher lui pointe du doigt une villa au bout de la rue et lui dit qu’il est sûr qu’elle fera l’affaire. Eli la visite et effectivement, il l’aime depuis le premier instant. Il conclue l’affaire et il en fait part à Eli qui lui souhaite mazal tov mais au passage lui demande aussi son dû ! En effet, il sait de source sûre qu’il faut lui régler une commission d’agent immobilier, car ce même cas s’est déjà présenté avec son voisin du dessus, et les Dayanim lui ont donné gain de cause. Il assure à Eli qu’il n’est guère besoin d’aller au beth dine pour vérifier et que n’importe qui, connaissant un peu de halakha le lui confirmera. Eli insiste et ils se rendent en toute cordialité au beth dine. Eli en sort acquitté ! Acher (et Eli aussi) désirent comprendre qu’est-ce qui justifie cette différence dans la halakha. Est-ce une divergence de point de vue entre les dayanim ou bien les touristes français ont-ils un régime particulier ?

Réponse : En effet dans ce cas il faut admettre qu’il y a préférence pour les touristes et pas seulement les français. Remontons aux sources : Le seul fait de montrer un appartement ou d’amener des clients dans un magasin ou un restaurant etc. comme le font certains commerces à l’aide de rabatteurs, donne droit à une rémunération. Voir à ce sujet le commentaire du Gaone de Vilna (13) sur le Chouklkhan ‘Aroukh Hochen Michpat (185), dans lequel il établit cette règle. Tout celui qui rend un service normalement rémunéré, doit être lui aussi rémunéré même s’il n’a pas demandé à l’être ou même si personne ne lui a demandé de le rendre. La source est le Talmud Baba métsia (101, A) : celui qui plante des arbres dans un terrain destiné à cet effet doit être normalement rémunéré (et non à la baisse) par le propriétaire du terrain.

La particularité de ce commentaire du Gaone de Vilna est qu’il tranche au sujet d’une controverse des décisionnaires dans ce passage du talmud. En effet, selon certains on ne pourra exiger une rémunération si le service n’a pas augmenté la valeur de la chose ou  du terrain, tels des arbres ou le terrain qui est maintenant labouré et vaut plus cher dans cet état, etc. Quand on rend un simple service virtuel, même si d’autres exigent une rémunération avant de le rendre, quand l’acte a été fait sans concertation préalable, il n’y a pas lieu de demander un paiement. C’est l’avis des Tossafote et du Roch (Baba métsia 101), et c’est ainsi que l’a commenté Ma’hané Efraïm (nizké mamone 2) et Helkat Yoav (hochen 9) qui a retenu cet avis. (Voire aussi à ce sujet birkat Chmouel Baba métsia 26 au nom de rabbi Hayim Brisker).

Dans notre cas, montrer un appartement n’est donc pas une matière ou un travail qui, comme quelque chose investi dans un terrain, augmente sa valeur. C’est un service virtuel et selon les Tossafote, il n’y pas lieu de demander un paiement si cela n’a pas été convenu au préalable.

Mais la halakha va plus loin. Car il faut savoir que même selon les Tossafote, il y a aussi lieu de payer un salaire de rabatteur dans certains cas. En effet, Rachba (Téchouvote T4, 125) explique que le fait d’avoir établi une habitude entre les commerçants pour les rabatteurs de recevoir un pourcentage quand ils amènent des clients dans les magasins fait que le silence devient éloquent ! En effet, même s’ils ne le disent pas en rentrant au magasin, ni au propriétaire du magasin ou au vendeur, c’est évident qu’ils s’attendent à être payés et c’est comme s’ils l’avaient dit tout haut. Il y a donc un contrat tacite entre les deux parties et personne ne peut dire qu’il n’a pas compris puisqu’il s’agit d’une règle bien établie.

En vertu de cela, même si l’on se base sur ce responsa de Rachba, Eli qui est français, ne comprend pas ce silence et ne sait pas qu’en Israël, c’est un us bien établi que ‘’certains’’ demandent à être rémunérés quand ils indiquent un bien immobilier. On ne peut donc établir que le silence d’Acher était ‘’éloquent’’ puisqu’Eli ne le comprend pas et il n’y a donc pas eut de contrat tacite.

D’autre part on ne va pas appliquer l’avis du Gaone de Vilna et considérer un service virtuel rendu comme quelqu’un qui plante des arbres dans un champ à l’insu de son propriétaire, car les Tossafote ne sont d’accord. La règle étant  hamotsi mé’havéro alv haréaya, afin de sortir de l’argent, il faut apporter des preuves irréfutables et acceptées unanimement.

Acher a effectivement reçu une prestation pour le même événement mais parce que son voisin était israélien et qu’il n’était pas sensé ignoré cette habitude. Les Dayanim ont donc considéré qu’il y avait un contrat tacite entre les deux même si Acher ne l’avait pas évoqué, au même titre que les rabatteurs évoqués dans les téchouvote du Rachba précédemment citées.

(Il faut savoir qu’il y aurait eut, éventuellement, une autre base selon la halakha pour étayer la demande de rémunération d’Acher. En effet, Eli a profité de ce renseignement et cela a une valeur dans le marché. Mais Ma’hané Efraïm (Id.) établit selon  l’avis des tossafotes (‘Houlin 131) que l’on ne doit pas payer pour une jouissance si elle aurait pu être évitée ou obtenue gratuitement (ou si à moindre coût alors on devra selon ce qui aurait été dépensé). C’est la règle de ‘’michtarché lé’’ Dans le cas d’Eli, il n’était pas obligé de passer par un agent immobilier car plusieurs sites de particulier à particuliers la proposaient.)

                                                                Rav Yossef Simony

 

05-832-43-832.

TRIBUNAL RABBINIQUE POUR PUBLIC FRANCOPHONE
Pour toutes vos questions et arbitrage, Michpat Chalom:
Contact www.Michpat-Chalom.com

 

comment_decourager_les_voleurs_670Cela fait quelques années que David est baal téchouva, et aujourd’hui il est perturbé par les délits de vol qu’il a commis quand il était mineur religieusement. Que doit-il faire?

Ce qui a été volé quand il était déjà bar mitsva, il doit bien entendu le rembourser et s’il ne sait pas à qui le rembourser alors qu’il fasse d’une somme équivalente à ses délits des objets d’utilisation et d’intérêt public. (Hochen366; 2). Ce qu’il a volé avant sa bar mitsva, Rambam Hovel (4;20), qu’un retardé mental et un enfant même s’il a grandi et ou qu’il est devenu normal, ce qu’ils ont volé durant la période antérieure ne les engage pas parce qu’ils ne l’ont pas fait volontairement.Par contre rach (Baba Kama 78,b) affirme qu’un enfant qui vole, en grandissant doit rendre ce qu’il a volé et ainsi s’est positionné Or Zaroua.  Choulhan Aroukh (76, 3 et 349, 3) opte pour l’avis de rambam sauf si l’objet en question est encore entre ses mains. Roch aussi (Chvouot 6,23), établit que les dégats d’un jeune enfant même s’il avoue ses torts ne lui seront pas imputés quand il grandit parce qu’il n’était pas responsable de ses actes.  De tous ces décisionnaires il semble clair qu’il n’y ait aucune obligation même religieuse (yédé chamayim) de rembourser et ainsi en a conclu yabia Omer (8,66). Cependant Michna broura en fin de chap. 343 rapporte l’avis de Taz et Gra et Hayé Adam qu’il est conseillé de s’acquitter de cette dette.  Mais Chvout Yaakov (il le déduit des écrit du Troumat Hadechene 62) rajoute que si quelqu’un vient à rembourser par acte de vertu, il n’est pas besoin de rembourser la totalité de la valeur du délit ou du vol. Voir aussi la formulation de Rama (343) qui va dans ce sens.

Il faut savoir que tout cela n’est vrai que dans un cas de délit ou de vol mais pas si l’enfant a emprunté pour ses besoins primaires etc. ou a commercé. Voir à ce sujet Rambam (Malvé 26,10) au sujet d’un emprunt et Maguid (Id.) qui commente qu’il s’agit d’un enfant en droit de commercer. Voir aussi Sma’h (Hochen 235, 43) que dans le cas d’un emprunt pour se ourrir, l’enfant devra rendre quelque soit l’âge durant lequel il a contracté cette dette (même avant d’être en age de commercer –onat hapéoutote-).

Rav Réouven Cohen

 

La veille de Hanouka, une caisse de vingt bouteilles d’huile était posée à la vente à l’entrée du bet hamidrach. Le prix annoncé sur la petite boite était de 19 shekels. Avi a décidé de payer le vendeur de façon originale : il a changé le prix marqué de 19 à 20 shekels. Deux jours plus tard, 19 clients avaient payé 20 shekels, ce qui correspondait à la somme entière que le vendeur avait espéré obtenir, et Avi a pris gratuitement la dernière bouteille. Avi peut-il utiliser cette huile de Hanouka sans la payer ? Le vendeur doit il rembourser 1 shekel à chaque acheteur ?

Réponse : Le Némouké Yossef (Baba Kama 9, rapporté par le Rama ‘Hochen Michpat 363;10) écrit : « Réouven a loué sà Chimon une maison à un prix plus élevé que celui du marché. Chimon se rend compte que la maison appartient en réalité à Yéhouda, [Réouven s’étant fait passer pour le propriétaire]. Chimon est en droit de dire à Yéhouda qu’il ne paiera pas pour la période révolue selon la somme fixée [par Réouven] car le contrat est nul [puisque Réouven n’est pas propriétaire] et ce, même s’il a déjà remis l’argent à Réouven. Par contre, s’il a donné l’argent à Yéhouda, ce dernier pourra lui faire savoir qu’il n’avait pas l’intention de louer sa maison pour une somme moins élevée. Dans ce cas, [puisque Yéhouda souhaitait obtenir cette somme-là], Yéhouda pourra garder cet argent ». Il est donc clairement énoncé  que le vendeur ne peut pas garder une somme supérieure à celle qu’il aurait souhaité obtenir, même si l’acheteur était prêt à débourser davantage. Le vendeur doit donc rendre à chaque acheteur la somme d’un shekel. S’il ne retrouve pas tous les acheteurs, il utilisera cette somme pour une cause d’intérêt public, par exemple en achetant des stylos et des feuilles au profit des étudiants de ce bet hamidrach, en espérant que les acheteurs en profiteront (Choul’han Aroukh 366;2 au sujet d’un voleur qui souhaite faire techouva mais ne retrouve pas les victimes de ses larcins). Quant à Avi, il est évident qu’il devra payer le prix de la bouteille qu’il a prise, d’autant plus qu’on a établi que le vendeur doit rembourser la différence à chaque acheteur.

Rav Reouven Cohen

intro-musiqueEst-il permis de permis de copier un disque sans la permission des détenteurs des copyrights?

Il y a une controverse à ce sujet entre les décisionnaires des derniers siècles (aharonim) et contemporains. Choel ouméchiv ( A, 44) considère cela comme un acte de vol même si cela ne porte pas préjudice à l’auteur car la sagesse est propriété de celui qui le produit. Nétsiv (Méchiv Davar 24) partage cet avis ainsi que Rav Eliachiv. d’autre part certains décisionnaires ne considèrent pas la production artistique ou autre comme une propriété car elle est virtuelle. c’est ce qu’il est donné de comprendre de Rama quand il interdit d’acheter un livre de rambam qui ne serait pas publié par untel en arguant l’avis d’Aviassaf (rapporté par bet yossef 156 selon lequel on ne pourra ouvrir un magasin dans une ruelle où il y en a un autre. c’est donc qu’il n’y a pas de propriété mais plutôt des lois de concurrence. C’est aussi l’avis de hatam sofer (hochen 69) qui interdit cette forme copiage en menaçant d’excommunions etc. Il semblerait que ce soit l’avis de beaucoup de décisionnaires si l’on se réfère à leur lettres d’approbation aux livres de leurs contemporains. En effet ils interdisent le copiage par la force d’excommunions etc. et non par souci d’éviter le vol de la propriété intellectuelle. (voir la préface de Havot Yayir dans laquelle les préfaciers interdisent de publier son livre durant une période de 10 ans.). C’est l’avis que retiennent rav Ben Tsion abba Chaoul et Rav Chlomo zalman Oyerbach et Tsits Eliezer (18, 80). il est donc évident, face à cette controverse entre les grands du monde de la halakha, qu’il est décent de s’abstenir de copier et de voler une propriété intellectuelle. D’autant plus que la production intellectuelle est aujourd’hui une forme de parnassa et que les artistes etc. investissent beaucoup de fonds et d’efforts. il faut savoir que cela est vrai pour des fins non commerciales. Mais copier à des fins commerciales est interdit selon tous les décisionnaires. Certains se basent sur le Tossafote kidouchine 59 ( hatam sofer 79 , sridé ech (3 129), maharachdam   259) selon lequel il est interdit de pécher quand quelqu’un a placé un piège avec un appât et que les poissons se sont réunis autour de cet appât. On considèrera que les poissons sont la propriété de celui qui les a attiré midérabanan. ici aussi on ne pourra attirer des clients autour d’un  »appât » préparé par autrui en la forme d’une création intellectuelle. D’autres feront ressembler cela à une entente tacite entre commerçant (minhag soharim) évoquée dans le Talmud (baba batra 8 b)  et voir à ce sujet rachba (20, b) Et de même qu’il est interdit de vendre ces reproductions etc…, personne ne devra les acheter car comme disent nos sages:  »la sourit ne volerait pas si elle ne trouvait pas le trou où mettre son butin c’est donc le trou qui est le voleur ».

                                                                                                                      Rav Reouven Cohen

showroom-oh-my-robeMyriam confectionne sur commande des robes de mariées qu’elle récupère et loue ensuite. Rivka s’est vite décidée sur une robe et elle a fait faire des retouches à Myriam en lui assurant qu’elle la louerait. Il ne manquait plus que des petites finitions quand Rivka changea d’avis et ne la voulut plus pour une raison qui ne concernait pas Myriam : la robe qu’elle avait choisit était trop simple. Elle est consciente que sa démarche n’a pas été élégante et elle est prête à dédommager Myriam pour ce qu’elle a travaillé. Myriam demande quel est la halakha.

Il est important, tout d’abord, de définir quelle est la nature du travail de Myriam. Est-elle aussi une ouvrière ou bien est-ce plutôt uniquement une location de robe ? Dans ce dernier cas son travail est nécessaire afin de fournir un objet apte à la location et elle n’est donc pas une ouvrière. Ce serait pareil à une location d’appartement qu’il faudrait mettre en état avant que les locataires n’y pénètrent. C’est ainsi qu’il est logique de voir les choses. C’est une location.

Partant de là, nous devons savoir si la location a déjà commencé depuis le moment de l’accord tacite (le moyen d’acquisition utilisé serait le fait de l’avoir soulevée) ou bien fallait-il attendre jusqu’au moment où Rivka s’en allait chez elle avec la robe. Car il est possible de louer un objet ou un appartement et de réaliser un kiniane , un moyen d’acquisition, même si le moment n’est pas encore venu de l’utiliser. Ce kiniane servirait à réserver l’objet de manière à ce que Myriam ne puisse le louer à quelqu’un d’autre et aussi à faire en sorte que Rivka ne puisse changer d’avis.

Nous trouvons un cas semblable dans le Choul’hane aroukh (Hochen michpat 200, 8). Selon l’avis de Rama dont la source est Tour (Id.), quand un client veut acquérir une denrée etc. mais plus tard, par méchikha (en pénétrant la chose dans son domaine), il en devient déjà propriétaire en  le soulevant. La raison à cela est commentée par rabbi Akiva Eiger : le vendeur est intéressé à la vendre et il s’opère ce qui est décrit par da’at a’héret makna (la volonté d’un autre –le vendeur-  fait toute la force de l’acquisition). La logique à cela est, que le client veut l’acheter de toute façon et il est sincère. Il pensait simplement pour des raisons que le meilleur moyen était la méchikha (en pénétrant la chose dans son domaine).

Dans ce cas, il faut souligner que le client perd la prérogative de pouvoir se rétracter. Il avait en effet le temps de le faire jusqu’au moment où il arriverait dans son domaine. C’est aussi un enseignement inédit que nous tirons de ce dine.

Dans notre cas aussi, Myriam est intéressée à louer au plus vite sa robe et puisque Rivka était sincère, et bien qu’elle ne gagne pas forcément à devancer l’heure de son acquisition (comme nous l’avons compris plus haut), da’at a’héret makna (la volonté d’un autre –le vendeur-  fait toute la force de l’acquisition) et la robe est donc louée.

Si nous concluons ainsi, Rivka doit payer toute la location sans aucune remise (voir à ce sujet Chakh sur Choulhane aroukh 334,2). En effet, quand quelqu’un loue un objet et ne l’utilise pas, il ne lui revient aucun dédommagement.