Cette année, David a invité beaucoup de monde à la séoudat Pourim et a dû emprunter au gma’h une table pliante. Philippe, qui faisait partie des invités, boit un coup de trop et en chantant, il frappe très fort sur la table qui se fend en deux. Après Pourim, il appelle David pour s’excuser. David le met à l’aise et lui explique qu’il s’agit d’une simple table en plastique qui ne vaut que 200 shekels. Tous deux se demandent qui doit rembourser la table au gma’h.
Réponse : Le Rama (Ora’h ‘Hayim 695 ; 2) écrit que celui qui cause un dommage au cours de la joie de Pourim sera dispensé de payer. Le Maguen Avraham précise qu’il s’agit uniquement d’un dégât causé involontairement du fait de la joie, mais pas dans l’intention d’endommager. Le Michna Beroura 13 rapporte l’avis du Ba’h qui limite cette dispense à un dégât léger. Il semble que celui qui frappe sur la table pour accompagner son chant est inclus dans cette dispense. De plus, il s’agit d’une somme qui n’est pas importante. Mais certains auteurs contemporains se sont appuyés sur le Nétivot pour considérer Philippe obligé de payer la table. Ils affirment qu’il faut le considérer pas seulement comme une personne qui cause un dommage mais aussi comme un emprunteur qui endosse, selon la Torah, toutes les responsabilités pour l’objet emprunté. Le Nétivot (340 ; 8) écrit que celui qui emprunte un banc ou un livre pour l’utiliser chez le préteur pendant un certain temps, bien qu’il n’ait pas fait d’acte d’acquisition pour endosser les responsabilités de choel (emprunteur), sera considéré comme un choel, du fait de l’utilisation de l’objet. Le profit de l’utilisation a une valeur d’argent qui fait effet de kinyane (acte d’acquisition). En s’appuyant là-dessus, ces auteurs considèrent Philippe comme choel de la table que son hôte a mise à sa disposition. Il en a donc l’entière responsabilité, même à Pourim. Philippe doit de toute façon rendre l’objet emprunté comme tout gardien.
Mais à mon humble avis, le Nétivot ne s’applique pas dans notre cas car il parle de celui qui emprunte un objet pour un moment donné, même si l’objet se trouve chez son propriétaire. Selon la halakha, lorsque je prête un objet pour un moment, je ne peux pas le reprendre pendant ce laps de temps. L’emprunteur acquiert un droit d’utilisation que je ne pourrai pas lui retirer sans son accord. Ce droit implique toutes les responsabilités d’un choel. Ce n’est pas le cas pour mon invité : il peut utiliser mes meubles et consommer mes aliments mais il n’a acquis aucun droit sur eux. Je peux à tout moment écourter mon invitation ou lui interdire de manger. Le ‘Hatam Sofer (‘Hochen Michpat 50) fait clairement cette distinction entre celui qui prête sa maison (ce qui donne à l’emprunteur une certaine propriété) et celui qui héberge son prochain chez lui (qui ne possède aucun droit de propriété).
Conclusion : La table n’ayant pas une grande valeur, Philippe n’est pas tenu de la rembourser.
Rav Réouven Cohen

Les dégâts à Pourim