Dan a grandi dans une famille très aisée. Après son mariage, il continue le même train de vie sans en avoir vraiment les moyens. Ses amis, qui connaissent son père, lui font confiance et lui prêtent de grosses sommes sans même établir de contrat. Au bout d’un moment, ils s’aperçoivent qu’il n’a pas de quoi rembourser. Il se tournent vers son père qui leur répond qu’ils n’auraient pas dû lui prêter de l’argent. Mais il les rassure : Dan s’est engagé dans une nouvelle affaire et devrait bientôt être en mesure de commencer à les rembourser. Les créanciers demandent au père de Dan de se porter garant. Celui-ci n’a aucune raison d’accepter, mais il leur fait une proposition : il est prêt à le faire pour qui renoncera à 40% de la dette. Trois créanciers acceptent, et le père se porte garant pour les 60% restants de leur dû. L’échéance arrivée, Dan n’est toujours pas en mesure de rembourser. Son père veut retirer sa proposition et demande aux créanciers de s’arranger directement avec son fils sur la totalité du prêt. Est-ce permis ?
Réponse : le Choul’han Aroukh ‘Hochen Michpat (129 ; 2) écrit que le garant s’engage par la parole. Mais plus haut (129 ; 1), il écrit que celui qui se porte garant après le prêt sera tenu de payer uniquement s’il a fait un kinyane (acte d’acquisition). La raison de cette halakha est qu’un garant est censé payer seulement si le prêteur a compté sur sa garantie pour débourser l’argent, mais pas si l’argent a été remis à l’emprunteur avant l’engagement du garant. Il faudra donc un acte supplémentaire (le kinyane) pour que cela engage le garant. Or le Rama (3) écrit que si le créancier renonce à son dû sur la demande du garant (le Sma’ explique qu’il renonce à son dû pour n’avoir affaire qu’au garant), même après que l’argent ait été prêté, la garantie sera valable même sans acte d’acquisition. Il en sera de même pour le père de Dan. Comme les créanciers ont renoncé à 40% de leur dû pour bénéficier de la garantie du père, ce dernier devra donc payer les 60% restants. Il ne pourra pas annuler sa garantie et les créanciers ne pourront pas se dédire. D’ailleurs, même si Dan est en mesure de payer, il ne devra rembourser que 60% du prêt car le renoncement des créanciers a été ferme et sans condition. Par contre, s’ils avaient mis pour condition qu’ils renonçaient à 40 % si le père de Dan remboursait les 60% de la somme, la loi aurait été différente. Le père aurait pu se rétracter et les créanciers auraient pu réclamer à Dan la totalité de la dette.
Conclusion : le père de Dan doit respecter son engagement d’être garant et rembourser 60% des prêts des trois créanciers.
Rav Réouven Cohen