David travaille pour un fournisseur de téléphones portables. Il est notamment chargé de découvrir les appareils défectueux, de les vendre au rabais à des prix qui lui semblent convenables et de prendre un pourcentage. David, spécialiste dans ce domaine, décide de les acheter lui-même pour les réparer et les vendre à un prix bien plus élevé. Il ne compte pas informer son employeur car celui-ci risquerait de lui imposer de faire ce travail pour lui. David se demande s’il a le droit d’agir de cette façon.

Réponse:

Le Choul’hane Aroukh (‘Hochène Michpat 185;1-2) écrit : « Le courtier est en fait un émissaire rémunéré pour vendre et ne pourra pas acheter lui-même l’objet qu’il est censé vendre ». En effet, il est dit dans le traité Ketouvot 98a : « Si une veuve a évalué et pris un bien que son mari [défunt] a laissé, dans le but d’encaisser l’argent qui lui revient de par sa Kétouba, ce bien ne lui appartient pas. Mais elle pourra le vendre à quelqu’un d’autre et récupérer son dû ». Le Tour (idem) rapporte l’explication du Rachba disant qu’une vente consiste à faire passer un objet d’un propriétaire à un autre. Le vendeur consent à faire sortir l’objet de sa possession et l’acheteur fait un acte pour faire entrer l’objet dans sa possession. Et pour ce faire, il faut deux personnes distinctes. Or la veuve étant considérée comme l’envoyée de ses enfants orphelins pour vendre le bien, elle ne pourra pas agir en tant qu’acheteur. Il en est de même pour le courtier qui est embauché pour vendre : David ne peut pas être à la fois vendeur et acheteur et est donc incapable  d’acheter lui-même ces appareils. Le prix élevé qu’il obtiendra de la vente après sa réparation reviendra donc à son employeur (en retirant son salaire pour sa réparation). David pourrait par contre surmonter ce problème en vendant les appareils à sa femme ou à un ami et les récupérer ensuite.

Mais il faut savoir que l’explication du Rachba n’a pas été retenue par tous. Le Chakh (3) sur le Choul’hane Aroukh y fait déjà allusion. En effet, le Ritba (Ketouvot 98a) rapporte l’avis des Guéonim qui rendent l’achat de la veuve non valable parce qu’on craint qu’elle évalue mal le bien. C’est pour cette raison que le Rambam (Ichout 17) rend valable la saisie de la veuve lorsque le beth dine a déjà fixé le prix du bien. Le Ma’hané Efraim (Chli’hout 20) affirme que même le Choul’hane Aroukh (Evène Haézer 103;5) a retenu cet avis. De toute façon, dans le cas de David, ce problème existe aussi : puisqu’il doit lui-même fixer le prix de vente des appareils défectueux, il est soupçonné d’évaluer l’objet en sa faveur. Il lui sera donc interdit d’acheter les portables, même par l’intermédiaire d’un ami.

Rav Réouven Cohen

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Moché a commandé des ballons chez David, à l’occasion d’une réception, pour un montant de 1200 euros. Moché a réglé en 6 coupures de deux cent euros chacune. Après quelques jours, David téléphone à Moché, lui disant qu’il vient de s’apercevoir que l’un de ces billets est faux, arguant qu’il provient de son règlement  et non de celui d’un autre client. Moché lui a répondu qu’il ne pouvait pas se fier à lui-même s’il ne pouvait jurer qu’aucun billet n’était faux. A  sa connaissance, il lui avait réglé la commande et c’était, pour lui,  une affaire conclue. Mais David est sûr de lui: il n’a pas mélangé cet argent avec celui des autres commandes.

Réponse: Le Choukhan ‘Aroukh (75; 9) établit;  »Quand un homme réclame une somme qu’il a prêté et que le défendant émet des doutes sur l’emprunt, il est exempt de tout paiement mais doit simplement jurer pour appuyer ses dires. Mais s’il se souvient de l’emprunt mais n’est pas sûr de l’avoir rendu, il doit rembourser la totalité de la somme.

Dans notre cas, Moché n’est pas garanti d’avoir tout payé puisqu’il n’est pas sûr que tous ses billets étaient vrais. Le décisionnaire Taz (75) exempt pourtant Moché de tout paiement. Selon lui, puisque la plupart des billets de banque en circulation sont vrais, il y a eu un acte de paiement que l’on doit juger comme valide. Pour le rendre invalide il faut le prouver dûment.   Le décisionnaire Chakh (232; 15) au nom de Maharchdam (80) dit qu’il faut plutôt comparer cela à un défendant qui n’est pas certain d’avoir remboursé sa dette. Que fait-on donc?

Dagoul Mervava (232) opte comme le Taz et Aroukh Hachoulkhan fait pencher, au nom de la majeur partie des décisionnaires, en faveur du Taz,  mais ce dernier conseille quand même une péchara, un accord à l’amiable selon les clauses instaurées par le Chvout Yaakov (vol.2, resp. 144). Moché sera tenu de donner  un tiers de la somme à David: 66 euros

Rav Reouven Cohen

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appartement-a-vendre-a-saint-josse-ten-noode-37f981a9d4e77794d54606b615bb8d2cRéouven a acheté un appartement à Jérusalem. Il a signé sur un contrat de vente il a versé vingt pour cent de la somme. La transaction a été enregistrée en la forme d’une mention à son nom dans les registres du cadastre (éarate hazhara au tabou).  Quand il rentre dans l’appartement, mais ce encore avant l’enregistrement définitif de l’appartement au cadastre (tabou), il s’aperçoit que le système de chauffage est défectueux. Une semaine plus tard, dans une réunion de la copropriété, il est décidé de frais de réfection de la toiture. Réouven demande la réparation du système de  chauffage car il a été endommagé avant qu’il est inclus dans la vente l’appartement. David, le vendeur, rétorque que le système s’est détérioré après la signature du contrat et qu’il appartenait donc déjà à Réouven. Quant à la toiture, Réouven ne considère la maison vraiment sienne jusqu’à l’enregistrement au cadastre.

Réponse : selon le Talmud, (kidouchine 26) et Choulhan aroukh (191) on peut acquérir un terrain avec de l’argent un acte écrit ou une action démontrant la propriété tel réparer etc. Mais quand l’habitude est d’écrire un contrat, l’argent n’est plus valide car on ne se sert plus de l’argent seul de peur de ne pas laisser de trace. Mais aujourd’hui, bien que le contrat que nous écrivons est une habitude, il  ne peut être considéré comme un acte d’achat car les termes qui y figurent ne sont pas des termes de vente et d’achat mais des engagement mutuels. L’argent est donc le moyen d’acquisition mais comme l’habitude est de signer un contrat, il est conditionné par cette écriture. D’autre part, même si un acompte peut servir de moyen d’acquisition selon la halakha (voir  Choulhan aroukh 192, 2 et Sma’ et Taz), aujourd’hui, puisque l’habitude est de ne pas laisser entrer l’acheteur jusqu’à qu’il ne paye l’entièreté de la somme, il faudra donc attendre la fin des paiements pour dire que l’appartement est acquis (Rav zalman Nehemia Goldberg etc.). il en ressort donc que le système de chauffage était en possession du vendeur quand il s’est détérioré et le contrat stipulait qu’il était en bon état. Il doit le réparer ou le changer. Dans le cas où il le change entièrement par un nouveau, Réouven devra donner la différence entre le prix d’un neuf et d’un ancien .

Quant à la toiture, l’enregistrement définitif au cadastre n’est pas une condition sine qua non pour l’acquisition (. Tant qu’il y a une mention de la transaction, tout le monde sait que l’acheteur est protégé. La toiture est donc aux frais de Réouven (Hazon ich Likoutim 16, Maadané erets Chéviite 2 ;13 ).

Rav Réouven Cohen

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remerciements-cadeauQuestion : Les élèves d’une classe décident d’offrir un cadeau à leur professeur et remettent de l’argent à Chimon pour qu’il achète une bouteille de bon vin. Chimon voit que le magasin propose en promotion un cadeau de six verres pour l’achat d’une bouteille de vin. Après avoir acheté la bouteille, Chimon reçoit les verres. A qui appartiennent ces verres ? A Chimon ou à toute la classe ?

Réponse : « Si le prix était fixé et connu, et que [le marchand] a donné davantage à l’envoyé en quantité, en poids ou en mesure, ce supplément appartient aux deux et l’envoyé doit partager ce supplément avec le propriétaire de l’argent [qui l’a envoyé faire cet achat] » (Choul’hane Aroukh ‘Hochène Michpat 183.6). La source de cette loi est la Guemara (Kétoubot 98b) disant au nom de Rabbi Yossei que quand un prix est déterminé, l’envoyé (qui effectue l’achat) et l’envoyeur (qui donne l’argent) partagent le supplément offert. Selon le Rif, ce supplément appartient entièrement à l’envoyé, mais puisque ce profit lui parvient grâce à l’argent de l’envoyeur, nos Sages disent que le supplément doit être partagé entre eux deux. Tel est aussi l’avis de du Roch et de l’auteur du Itour. Toutefois, Rachi explique que le supplément doit être partagé parce qu’il y a un doute de savoir si le marchand voulait faire ce cadeau à l’envoyé ou à l’envoyeur. D’après cette opinion, si le marchand dit explicitement qu’il donne ce cadeau à l’envoyé, il appartient à l’envoyé, contrairement à l’opinion du Rif (comme le dit le Ran).

Le Rama tranche : « Si le marchand dit clairement qu’il donne [ce supplément] à l’envoyé, il appartient entièrement à l’envoyé », en accord avec l’opinion de Rachi. Par contre, le Chakh écrit qu’il faut suivre l’opinion du Rif. Le Taz et le Nétivot aussi ont des objections à l’explication de Rachi. A priori, dans notre cas, il semble que selon les deux opinions, l’envoyé (Chimon) et l’envoyeur (la classe) doivent partager le cadeau (les verres) – d’après Rachi à cause du doute, et d’après le Rif parce qu’il est donné à l’envoyé, qui doit donner la moitié au propriétaire de l’argent.

Cependant, il semble que de nos jours, les offres faites par les magasins ne sont absolument pas destinées au profit de l’envoyé (qui effectue l’achat) mais au profit de l’acheteur (qui possède l’argent). Elles ont pour seul but d’attirer ceux qui détiennent le pouvoir d’achat et sont donc toujours destinées aux propriétaires de l’argent. La Guemara et les Richonim cités plus haut parlent en fait d’un cadeau personnel fait à l’envoyé. Le Ketsot Ha’hochène (parag. 7) écrit : « Mais si le marchand donne [le cadeau] explicitement à l’envoyeur, même selon le Rif, il appartient entièrement à l’envoyeur, et l’envoyé n’a pas droit à une partie du cadeau pour son dérangement. En effet, il est impensable que si un homme envoie un cadeau à un ami par l’intermédiaire d’un envoyé, cet envoyé en prenne une part. »

Par conséquent, dans notre cas où les marchands donnent sans aucun doute le cadeau au client (et non à son envoyé), toutes les opinions sont d’accord qu’il appartient à l’envoyeur et que l’envoyé n’y a pas droit. Aussi, les six verres appartiennent à toute la classe, à moins que le cadeau ait été fait à Chimon en tant que membre du club des clients (et possesseur d’une carte privative), auquel cas il doit donner la moitié du cadeau au reste de la classe.

                                                                                                       Rav Reouven Cohen

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bibliotheques-sur-mesure_0Un jeune ‘Hatane du nom de Rafi a acheté une belle bibliothèque en bois massif pour meubler son nouvel appartement. Il s’est d’abord rendu au magasin de meubles afin de s’assurer que la bibliothèque en question n’avait aucun défaut. Après vérification, il donna au vendeur la somme de 2000 €. Les livreurs du magasin de meubles ont assuré le lendemain la livraison et l’installation de la bibliothèque. Plus tard, Rafi s’est rendu compte qu’un des flancs de la bibliothèque était formé de deux morceaux qui ont été collés et vernis de telle façon qu’au moment de l’achat, il ne s’en était pas rendu compte. Rafi convoque le vendeur en Din Torah et lui demande de reprendre le meuble et de lui rendre 2100 €, 2000€ pour la bibliothèque et 100€ supplémentaires correspondant au prix de spots lumineux qu’il y a installé.

Quant à lui, le vendeur répond : 1) Le fait qu’un des flancs soit constitué de deux planches ne s’appelle pas un défaut qui justifie l’annulation de la vente. 2) C’est à vous de vérifier votre achat avant le paiement et la livraison. 3) Je ne dois pas vous rembourser les spots lumineux, car bien qu’à votre goût, l’installation des spots ait ajouté à la valeur de la bibliothèque, mes acheteurs n’en ont souvent aucune utilité; cela  n’augmentera donc pas le prix de la bibliothèque lors de sa vente.

Réponse:

Le vendeur est-il en droit de prétendre que le collage de deux plaques ne s’appelle pas un défaut de fabrication ? Le Rambam (Ventes 15, 5) ainsi que le Choul’han ‘Arouh disent clairement (232, 6) que la définition d’un défaut est le fait que les gens qui en ont pris connaissance avant l’achat s’abstiennent d’acheter le produit à cause de cela. S’il en est ainsi, dans notre cas, toute personne qui désire du bois massif s’abstient d’acheter une telle qualité. On peut donc affirmer que c’est un défaut, et il rend la vente nulle.

A propos de ce qu’il reproche à Rafi, que c’était à lui de vérifier avant l’achat, il est vrai qu’il existe une discussion entre les décisionnaires à ce sujet. Certains disent que si l’acheteur pouvait vérifier l’état de l’objet acheté et ne l’a pas fait, on considère cela comme une renonciation au droit de réclamation. D’autres décisionnaires ne sont pas d’accord (voir Maguid Michné mekhira 15,3 ; Sma 232,10 ; Netivot 232,1). Cependant, leur différence d’opinion ne concerne que le cas où le défaut peut être facilement décelé par l’acheteur. Dans notre cas, ils sont tous d’accord que l’acheteur peut annuler l’achat, puisque Rafi lui-même a essayé de vérifier la présence d’un défaut, mais ne l’a pas décelé.

Quant à la somme à rembourser, le Ma’hara Sasson (117) rapprochait la Hala’ha dans un cas pareil d’une autre Hala’ha citée dans le Choulhan Arouh (103, 9) à propos d’un cas semblable. Cependant, le Nétivot Hamichpat (205, 4) le réfute par le biais du Choulhan Arouh lui-même (232, 14), qui tranche à ce sujet explicitement qu’il ne faut pas rendre l’investissement fait par l’acquéreur si le bien n’a pas pris de la valeur grâce à cet investissement. Etant donné qu’il y a une divergence d’opinion entre le Ma’hara Sasson et le Nétivot Hamichpat, nous ne pouvons pas demander au vendeur de rembourser l’installation des spots lumineux.

En conclusion, le vendeur devra reprendre sa marchandise et rendre à Rafi la somme de 2000 €.

                                                                 Rav Itshak Belahsen

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costume-bleu-mariage-495x400Question: Un jeune homme entre dans un magasin de vêtements et choisit un costume pour son mariage. Il le paie et l’emporte. Peu de temps après, il revient au magasin et dit au vendeur qu’étant donné qu’il a d’autres courses à faire dans les boutiques du quartier, il désire laisser le costume chez lui jusqu’à ce qu’il ait terminé ses emplettes.

Le vendeur accepte à condition qu’il le mette avec les autres costumes à vendre suspendus sur le tourniquet déposé sur le trottoir, afin qu’il n’encombre pas le passage.

Une heure plus tard, le jeune homme vient récupérer son costume. Mais le vendeur l’interpelle : « Pourquoi prenez-vous un costume d’une valeur de 500 euros alors que vous avez acheté un costume qui vaut 400 euros ? «. Le jeune homme de son côté prétend avoir acheté ce costume-là et pas un autre. Le vendeur, par contre, affirme ne pas être sûr à 100 %.

Réponse: A priori, dans un cas pareil, le Din dépend de la Ma’hloket connue (Guémara Baba Métsia 97b) : est-ce que » Bari Véchéma Bari Adif «, c’est à dire qu’à chaque fois qu’il y a un litige entre quelqu’un qui prétend être sûr et quelqu’un qui a des doutes, doit-on donner raison d’office à celui qui est sûr de ce qu’il affirme.

Selon la halakha (Choul’han ‘Aroukh 75,9), on n’oblige pas celui qui est dans le doute à payer celui qui prétend être sûr, étant donné que malgré son doute, c’est lui qui possède l’argent et si on veut faire lui prendre de l’argent, il faut une réelle preuve.

A noter, dans notre cas, que bien que le costume ne se trouve pas vraiment dans la propriété du vendeur puisqu’il se trouve à l’extérieur, étant donné que le costume appartenait à un moment donné au vendeur et qu’on est en doute de savoir s’il a changé de propriétaire ou non, on le donnera à celui auquel il appartenait auparavant. Ceci est appelé ‘Hezhat Mara Kama, et dans un cas pareil, on ne demandera pas non plus au vendeur de débourser de l’argent, bien qu’il soit dans le doute et que son prochain prétende être sûr (Choul’han ‘Aroukh 223,1).

Cependant, le Toumim (Klalei Tefissa 70) ainsi que le Nétivot Hamichpat (75,11 et 148,3) nous enseignent qu’on peut se fier à cette ‘Hezkat Mara Kama uniquement si nous n’avons qu’un seul doute sur un seul objet. Par contre, si tout le monde est d’accord qu’une vente a eu lieu mais qu’on se demande lequel des deux objets a été vendu, on ne pourra pas s’appuyer sur la ‘Hezkat Mara Kama pour acquitter le vendeur. Au contraire, on donnera raison à l’acheteur puisque lui seul est sûr d’avoir acheté un tel objet parmi les deux. Aussi, dans notre cas, nous donnerons au jeune homme le costume valant 500 euros.

Toutefois, le Divrei ‘Haim (Toen vénit’an 2) et le Imrei Bina (Toen vénit’an 6) ne sont pas d’accord avec le Toumim et le Nétivot Hamichpat cités ci-dessus. Et puisqu’il y a une différence d’opinion entre les Poskim à ce sujet, et que ni l’acheteur et ni le vendeur n’ont l’objet dans leur propriété, on se contentera de partager la somme qui est en litige, comme nous l’enseigne le Choul’han ‘Aroukh (Rama 133,4). Cela signifie que le jeune homme devra ajouter 50 euros pour prendre le costume qu’il voulait.

                                                                             Rav Itshak Belahsen

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Chimon est invité à la séouda de pourim chez un ami, Ilane. Il boit beaucoup et dans sa joie il décroche une toile qu’il finit par déchirer. Après avoir cuvé son vin, il est désolé de s’être tellement saoulé à un point où il ne se rappelle pas du tout de ses dérapages. Ilane lui demande de le dédommager pour cette toile mais Chimon invoque pour sa défense la fameuse exemption de Rama pour ceux qui commettent des dommages le jour de pourim.
Réponse: Effectivement le Rama Orah hayim 695;2 dispense de payer les dégats commis le jour de pourim. Mais il faut savoir que le Michna Broura 13 retient l’avis du Ba’h que la faveur ne s’accorde que pour un léger dégât.
D’autre part, le Rama Hochem Michpat 378;9 exempte les jeunes gens qui amusent les mariés en chevauchant à pleine vitesse devant eux, si jamais ils venaient à commettre des dommages durant cette parade. En effet ce dommage était prévisible et celui qui participe à la parade connait les risques. Il en sera de même pour un dégât causé lors d’une danse joyeuse durant les festivités de pourim. Mais Il faut savoir que la source de cette dispense, est dans le Agouda, qui n’évoque que les cas de dégâts non intentionnels. Un saoul qui frappe ou qui casse et cause des dommages, ne rentre donc pas dans le cadre de cette dispense.
Il serait cependant possible d’exempter Chimon en vertu du Choul’han Aroukh Hochen Michpat (235, 22) selon lequel les actes financiers et les transactions d’un saoul qui ne se rappelle pas de ses actes ne sont pas valides et ne peuvent pas lui être imputés. Nous serions donc tentés de nous inspirer de cette règle pour énoncer qu’un saoul n’est pas responsable de ses actions même quand il endommage la propriété d’autrui.
Pourtant, le Rambam (‘hovel vémazik 1, 11) écrit qu’un saoul doit payer ses dégâts. Le Yam chél Chlomo (baba Kama 3, 63) explique qu’un homme est tenu responsable de ce qu’il a commis quand il était saoul parce qu’il n’aurait pas dû en arriver là. Et ce, même le jour de pourim car l’obligation est de boire jusqu’à s’endormir et pas davantage comme l’a écrit le Rambam (méguila 2;15).
Conclusion : Chimone doit payer la valeur de la toile endomagée.
Rav Reouven Cohen

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douanier-parka-uniformeQuestion: Arié a demandé à son ami, Avi, de lui acheter cinq cartouches de cigarettes au duty-free et lui a avancé toute la somme. A son retour Avi a été arrêté à la douane et on lui a confisqué les cigarettes, jusqu’à règlement d’une amende de 500 euros. Arié  est parti chercher les cigarettes et il a payé l’amende enregistrée au nom d’Avi. Il réclame à Avi son argent qui lui, rétorque, qu’il n’a fait que rendre service.

Réponse: De toute évidence, Avi est responsable de ses actes et il ne peut les imputer à autrui sous prétexte qu’il lui a été demandé de les commettre. Et en particulier dans notre cas, où l’amende repose nommément sur Avi car c’est lui qui a commit cette infraction à la loi. Il est pourtant intéressant de relever l’opinion du Mordékhaï rapportée par le Rama (176) selon laquelle, si quelqu’un part en mission gratuitement pour un ami, tout ce qui lui advient durant la durée de la tâche, est pris en compte par l’envoyeur. Cela est en vertu de la halakha de choel, ou emprunteur, car l’émissaire s’est littéralement prêté. L’emprunteur est donc responsable de tous les dégâts corporels de l’envoyé. Cependant, cette halakha n’est pas applicable dans notre cas, car, comme le stipule ‘Hatam Sofer (55) rapporté dans Pit’hé téchouva (176), ceci ne concerne pas les dommages directement liés à la mission (s’y référer).

De même, puisqu’il il n’est pas question de deux associés, on ne pourra faire appel à l’obligation, (citée dans le pit’hé téchouva (176, 35), au nom de ‘Hatam Sofer), qu’ont les associés les uns envers les autres,  de prendre part à toutes les dépenses et dommages occasionnées par l’exercice de leur travail.

Psak dine: Mais tout cela est vrai jusqu’à l’instant où Arié est parti payer cette amende. Mais en faisant cela, il y a lieu de croire qu’il s’est senti coupable et a voulu endosser le dommage: Pit’hé téchouva (176, 36 au nom de Mayane Ganim). On ne pourra donc réclamer cette somme à Avi.

                                                                                    Rav Reouven Cohen

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annule-commande-cuisine-edcQuestion : David demande à son artisan, Chlomo, de lui faire une bibliothèque sur mesure. Chlomo achète le matériel et commence à travailler sur le projet. Après quelques jours David change d’avis et téléphone à Chlomo pour annuler la commande. Il s’assure auparavant que Chlomo n’a pas encore coupé les planches et qu’il peut s’en servir pour une autre commande. Toutefois Chlomo affirme en s’inspirant  d’un autre conflit avec un client réglé par un dayane qu’indépendamment de la perte de matériel, il y a un début de contrat avec commencement de travail et pour cette raison, David ne peut se rétracter.

Réponse : Il est vrai qu’un engagement avec un ouvrier est irréversible s’il a commencé à travailler. Dans le cas de Chlomo il a donc commencé à œuvrer sur le projet et même s’il n’a pas coupé les planches et il n’a été occasionné aucune perte de matériel, David devrait ne pas pouvoir se rétracter. Mais il faut savoir que parfois une commande chez un artisan peut se formuler de manière à ne pas vraiment engager. Quand par exemple on commanderait un gâteau etc. en promettant de l’acheter une fois fini et non en formulant les choses comme un contrat de travail. Un contrat de travail se dirait par exemple : ‘’fais cela et cela et je te rémunèrerais sur ton labeur’’. Alors qu’une promesse se dirait : ‘’ fais-le et je te l’achèterais’’.  Cette différence est commentée par Nétivote 333, 15 pour expliquer le dine énoncé par Roch (source de la halakha Hochen 333, 8). En effet selon Roch, quand on a dit à un artisan de faire quelque chose et qu’au moment où il le fournit on se rétracte, on doit quand même payer parce que sinon la chose va être jetée, comme dans le cas d’une denrée périssable etc. en vertu de dina dégarmi car on a occasionné une perte. Nétivote demande pourquoi seulement dans le cas d’une denrée périssable ? Ne doit-on pas payer un ouvrier pour la seule raison qu’il a travaillé à notre ordre et demande même si le travail a été effectué dans la rue etc. et que l’on n’en a pas jouit ? Il répond qu’ici la formulation est différente. Il n’y a pas eu de contrat de travail mais une promesse d’achat une fois l’objet fini. Cette promesse n’engage pas si ce n’est parce qu’elle a occasionnée une perte de matériel et d’énergie de travail (voire aussi Hazon Ich Baba Kama 23 ; 35).

De nos jours, même si la formulation n’est pas clairement comme une promesse d’achat, nous devons ainsi l’expliquer car c’est l’habitude de considérer les choses ainsi. La preuve à cela en est que même si la chose est accidentellement  endommagée chez l’artisan, on ne demande jamais à celui qui a commandé de payer pour le travail. Cela aurait dû être le cas, si l’on considérait l’artisan comme un ouvrier.

Le conflit  invoqué par Chlomo était différent. Il s’agissait d’un contrat avec un programmateur pour améliorer la qualité d’un site.  Il a donc travaillé sans fournir un nouveau produit. Dans ce cas, en commençant à travailler (‘hochen michpat 333, 2)  ou s’il y a eu début de paiement (Nétivote Id, 1), il y a obligation envers l’ouvrier  car on ne peut en aucun cas parler de promesse d’achat. C’est pour cette raison que Chlomo a dû payer dans ce cas les services du programmateur même après l’avoir arrêté en milieu de travail (selon un barème inférieur (de poèl batel)  puisqu’il n’a quand pas travaillé autant).

                                                                                                                 Rav Reouven Cohen

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Victor, qui habite à Casablanca, essaye de temps en temps de sortir du Maroc une partie de sa fortune. II trouve un jour une idée originale : quand son voisin Pinhas prévoit un voyage en Israël, il lui demande d’emporter un gâteau pour son fils qui étudie à Jérusalem, en insistant qu’il le garde dans ses bagages à main. Pinhas accepte, sans se douter que Victor a introduit une dizaine de diamants dans ce gâteau à la crème… A l’aéroport de Casablanca déjà, après avoir passé le contrôle de police, en ouvrant ses bagages à main à la sécurité, Pinhas s’aperçoit que le gâteau s’est écrasé et qu’il risque de salir ses affaires. Il décide donc de s’en débarrasser et le jette à la poubelle, avec l’intention d’acheter au fils de Victor un bon gâteau à Jérusalem. Deux jours après son arrivée, il reçoit un coup de fil de Victor lui demandant où sont passés ses diamants. Pinhas ne comprend pas de quoi il veut parler et raconte à Victor que son gâteau s’étant écrasé, il l’a jeté dans une poubelle à l’aéroport de Casablanca. Atterré, Victor se met à hurler et exige que Pinhas lui paye le dégât qu’il lui a causé. Est-il en droit de le demander ?
Réponse : la Guémara Baba Kama 62a écrit : « Si l’on donne à une femme une pièce d’or à garder en lui disant : ‘Fais-y attention, c’est une pièce d’argent’ [pour qu’elle ne refuse pas de garder un objet trop cher] et qu’elle l’endommage, elle payera le prix de l’or. Mais si elle la garde négligemment [et que la pièce disparait], elle ne payera que le prix d’une pièce d’argent. » Pour la garde, la femme peut dire qu’elle ne s’est engagée qu’à garder de l’argent, et pas de l’or, mais pour le dégât, celui qui lui a donné la pièce peut lui dire : « Comment se fait-il que tu m’ais causé un dommage ? » En d’autres termes, le dommage n’est jamais excusable. D’après cela, Pinhas serait obligé de payer puisqu’il a volontairement endommagé le gâteau. Mais plus loin, la Guémara se demande si l’on fait payer le dommage à celui qui a donné un coup de pied à une caisse sans connaitre son contenu, quand le propriétaire prétend qu’elle contenait une pierre précieuse. La Guémara reste dans le doute dans ce cas, si bien que nous ne pouvons donc pas obliger celui qui a causé le dommage à payer le dégât. Les Tossafot écrivent que même si des témoins affirment que la boite contenait une pierre précieuse, l’homme qui a donné le coup de pied sera dispensé de payer puisqu’il n’est pas censé connaitre le contenu précieux de cette boite (alors que pour la pièce d’or, il fallait se douter qu’il avait menti pour avoir l’accord de la femme de garder sa pièce). Le Rama (‘Hochen Michpat 386 ; 1) a retenu l’avis des Tossafot. Mais le Choulhan Aroukh (ibid.) rapporte les propos du Rambam qui laissent penser que c’est uniquement par manque de preuve qu’on est exempt de payer, mais des témoins ou un serment de la victime du dommage obligent le responsable du dommage à payer la valeur de la pierre précieuse contenue dans la boite. Mais le Chakh (4) considère que le Rambam aussi partage l’avis des Tossafot, ce qui dispenserait Pinhas de payer dans notre cas, puisqu’il n’était pas censé imaginer que le gâteau qu’il devait transporter contenait des diamants. De plus, il me semble qu’il existe une raison supplémentaire de le dispenser du remboursement : ce gâteau pourrait être considéré comme un « rodéf », quelqu’un qui s’apprête à tuer son prochain. Le Choul’han Aroukh (380 ; 4) écrit qu’en cas de tempête, il est permis de jeter à l’eau les biens d’autrui qui alourdissent le bateau et mettent en danger la vie des passagers ; c’est même considéré comme une mitsvah. Ces bagages du bateau ont un statut de « rodéf » car ils mettent les passagers en danger. Il semble qu’il en est de même pour ce gâteau car si Pinhas se faisait arrêter à la douane marocaine, il risquait fort la prison. Or d’après les poskim, l’incarcération, surtout dans certains pays, est considérée comme pikouah néfech, un danger de mort. Dans ces circonstances, Pinhas aurait eu le droit de se débarrasser de ce gâteau s’il avait su ce qu’il contenait.
Conclusion : Pinhas ne sera pas tenu de payer à Victor quoi que ce soit.
Rav Rèouven Cohen