La veille de Hanouka, une caisse de vingt bouteilles d’huile était posée à la vente à l’entrée du bet hamidrach. Le prix annoncé sur la petite boite était de 19 shekels. Avi a décidé de payer le vendeur de façon originale : il a changé le prix marqué de 19 à 20 shekels. Deux jours plus tard, 19 clients avaient payé 20 shekels, ce qui correspondait à la somme entière que le vendeur avait espéré obtenir, et Avi a pris gratuitement la dernière bouteille. Avi peut-il utiliser cette huile de Hanouka sans la payer ? Le vendeur doit il rembourser 1 shekel à chaque acheteur ?

Réponse : Le Némouké Yossef (Baba Kama 9, rapporté par le Rama ‘Hochen Michpat 363;10) écrit : « Réouven a loué sà Chimon une maison à un prix plus élevé que celui du marché. Chimon se rend compte que la maison appartient en réalité à Yéhouda, [Réouven s’étant fait passer pour le propriétaire]. Chimon est en droit de dire à Yéhouda qu’il ne paiera pas pour la période révolue selon la somme fixée [par Réouven] car le contrat est nul [puisque Réouven n’est pas propriétaire] et ce, même s’il a déjà remis l’argent à Réouven. Par contre, s’il a donné l’argent à Yéhouda, ce dernier pourra lui faire savoir qu’il n’avait pas l’intention de louer sa maison pour une somme moins élevée. Dans ce cas, [puisque Yéhouda souhaitait obtenir cette somme-là], Yéhouda pourra garder cet argent ». Il est donc clairement énoncé  que le vendeur ne peut pas garder une somme supérieure à celle qu’il aurait souhaité obtenir, même si l’acheteur était prêt à débourser davantage. Le vendeur doit donc rendre à chaque acheteur la somme d’un shekel. S’il ne retrouve pas tous les acheteurs, il utilisera cette somme pour une cause d’intérêt public, par exemple en achetant des stylos et des feuilles au profit des étudiants de ce bet hamidrach, en espérant que les acheteurs en profiteront (Choul’han Aroukh 366;2 au sujet d’un voleur qui souhaite faire techouva mais ne retrouve pas les victimes de ses larcins). Quant à Avi, il est évident qu’il devra payer le prix de la bouteille qu’il a prise, d’autant plus qu’on a établi que le vendeur doit rembourser la différence à chaque acheteur.

Rav Reouven Cohen

intro-musiqueEst-il permis de permis de copier un disque sans la permission des détenteurs des copyrights?

Il y a une controverse à ce sujet entre les décisionnaires des derniers siècles (aharonim) et contemporains. Choel ouméchiv ( A, 44) considère cela comme un acte de vol même si cela ne porte pas préjudice à l’auteur car la sagesse est propriété de celui qui le produit. Nétsiv (Méchiv Davar 24) partage cet avis ainsi que Rav Eliachiv. d’autre part certains décisionnaires ne considèrent pas la production artistique ou autre comme une propriété car elle est virtuelle. c’est ce qu’il est donné de comprendre de Rama quand il interdit d’acheter un livre de rambam qui ne serait pas publié par untel en arguant l’avis d’Aviassaf (rapporté par bet yossef 156 selon lequel on ne pourra ouvrir un magasin dans une ruelle où il y en a un autre. c’est donc qu’il n’y a pas de propriété mais plutôt des lois de concurrence. C’est aussi l’avis de hatam sofer (hochen 69) qui interdit cette forme copiage en menaçant d’excommunions etc. Il semblerait que ce soit l’avis de beaucoup de décisionnaires si l’on se réfère à leur lettres d’approbation aux livres de leurs contemporains. En effet ils interdisent le copiage par la force d’excommunions etc. et non par souci d’éviter le vol de la propriété intellectuelle. (voir la préface de Havot Yayir dans laquelle les préfaciers interdisent de publier son livre durant une période de 10 ans.). C’est l’avis que retiennent rav Ben Tsion abba Chaoul et Rav Chlomo zalman Oyerbach et Tsits Eliezer (18, 80). il est donc évident, face à cette controverse entre les grands du monde de la halakha, qu’il est décent de s’abstenir de copier et de voler une propriété intellectuelle. D’autant plus que la production intellectuelle est aujourd’hui une forme de parnassa et que les artistes etc. investissent beaucoup de fonds et d’efforts. il faut savoir que cela est vrai pour des fins non commerciales. Mais copier à des fins commerciales est interdit selon tous les décisionnaires. Certains se basent sur le Tossafote kidouchine 59 ( hatam sofer 79 , sridé ech (3 129), maharachdam   259) selon lequel il est interdit de pécher quand quelqu’un a placé un piège avec un appât et que les poissons se sont réunis autour de cet appât. On considèrera que les poissons sont la propriété de celui qui les a attiré midérabanan. ici aussi on ne pourra attirer des clients autour d’un  »appât » préparé par autrui en la forme d’une création intellectuelle. D’autres feront ressembler cela à une entente tacite entre commerçant (minhag soharim) évoquée dans le Talmud (baba batra 8 b)  et voir à ce sujet rachba (20, b) Et de même qu’il est interdit de vendre ces reproductions etc…, personne ne devra les acheter car comme disent nos sages:  »la sourit ne volerait pas si elle ne trouvait pas le trou où mettre son butin c’est donc le trou qui est le voleur ».

                                                                                                                      Rav Reouven Cohen

showroom-oh-my-robeMyriam confectionne sur commande des robes de mariées qu’elle récupère et loue ensuite. Rivka s’est vite décidée sur une robe et elle a fait faire des retouches à Myriam en lui assurant qu’elle la louerait. Il ne manquait plus que des petites finitions quand Rivka changea d’avis et ne la voulut plus pour une raison qui ne concernait pas Myriam : la robe qu’elle avait choisit était trop simple. Elle est consciente que sa démarche n’a pas été élégante et elle est prête à dédommager Myriam pour ce qu’elle a travaillé. Myriam demande quel est la halakha.

Il est important, tout d’abord, de définir quelle est la nature du travail de Myriam. Est-elle aussi une ouvrière ou bien est-ce plutôt uniquement une location de robe ? Dans ce dernier cas son travail est nécessaire afin de fournir un objet apte à la location et elle n’est donc pas une ouvrière. Ce serait pareil à une location d’appartement qu’il faudrait mettre en état avant que les locataires n’y pénètrent. C’est ainsi qu’il est logique de voir les choses. C’est une location.

Partant de là, nous devons savoir si la location a déjà commencé depuis le moment de l’accord tacite (le moyen d’acquisition utilisé serait le fait de l’avoir soulevée) ou bien fallait-il attendre jusqu’au moment où Rivka s’en allait chez elle avec la robe. Car il est possible de louer un objet ou un appartement et de réaliser un kiniane , un moyen d’acquisition, même si le moment n’est pas encore venu de l’utiliser. Ce kiniane servirait à réserver l’objet de manière à ce que Myriam ne puisse le louer à quelqu’un d’autre et aussi à faire en sorte que Rivka ne puisse changer d’avis.

Nous trouvons un cas semblable dans le Choul’hane aroukh (Hochen michpat 200, 8). Selon l’avis de Rama dont la source est Tour (Id.), quand un client veut acquérir une denrée etc. mais plus tard, par méchikha (en pénétrant la chose dans son domaine), il en devient déjà propriétaire en  le soulevant. La raison à cela est commentée par rabbi Akiva Eiger : le vendeur est intéressé à la vendre et il s’opère ce qui est décrit par da’at a’héret makna (la volonté d’un autre –le vendeur-  fait toute la force de l’acquisition). La logique à cela est, que le client veut l’acheter de toute façon et il est sincère. Il pensait simplement pour des raisons que le meilleur moyen était la méchikha (en pénétrant la chose dans son domaine).

Dans ce cas, il faut souligner que le client perd la prérogative de pouvoir se rétracter. Il avait en effet le temps de le faire jusqu’au moment où il arriverait dans son domaine. C’est aussi un enseignement inédit que nous tirons de ce dine.

Dans notre cas aussi, Myriam est intéressée à louer au plus vite sa robe et puisque Rivka était sincère, et bien qu’elle ne gagne pas forcément à devancer l’heure de son acquisition (comme nous l’avons compris plus haut), da’at a’héret makna (la volonté d’un autre –le vendeur-  fait toute la force de l’acquisition) et la robe est donc louée.

Si nous concluons ainsi, Rivka doit payer toute la location sans aucune remise (voir à ce sujet Chakh sur Choulhane aroukh 334,2). En effet, quand quelqu’un loue un objet et ne l’utilise pas, il ne lui revient aucun dédommagement.

1024499190Moché a commandé des ballons chez David, à l’occasion d’une réception, pour un montant de 1200 euros. Moché a réglé en 6 coupures de deux cent euros chacune. Après quelques jours, David téléphone à Moché, lui disant qu’il vient de s’apercevoir que l’un de ces billets est faux, arguant qu’il provient de son règlement  et non de celui d’un autre client. Moché lui a répondu qu’il ne pouvait pas se fier à lui-même s’il ne pouvait jurer qu’aucun billet n’était faux. A  sa connaissance, il lui avait réglé la commande et c’était, pour lui,  une affaire conclue. Mais David est sûr de lui: il n’a pas mélangé cet argent avec celui des autres commandes.

Réponse: Le Choukhan ‘Aroukh (75; 9) établit;  »Quand un homme réclame une somme qu’il a prêté et que le défendant émet des doutes sur l’emprunt, il est exempt de tout paiement mais doit simplement jurer pour appuyer ses dires. Mais s’il se souvient de l’emprunt mais n’est pas sûr de l’avoir rendu, il doit rembourser la totalité de la somme.

Dans notre cas, Moché n’est pas garanti d’avoir tout payé puisqu’il n’est pas sûr que tous ses billets étaient vrais. Le décisionnaire Taz (75) exempt pourtant Moché de tout paiement. Selon lui, puisque la plupart des billets de banque en circulation sont vrais, il y a eu un acte de paiement que l’on doit juger comme valide. Pour le rendre invalide il faut le prouver dûment.   Le décisionnaire Chakh (232; 15) au nom de Maharchdam (80) dit qu’il faut plutôt comparer cela à un défendant qui n’est pas certain d’avoir remboursé sa dette. Que fait-on donc?

Dagoul Mervava (232) opte comme le Taz et Aroukh Hachoulkhan fait pencher, au nom de la majeur partie des décisionnaires, en faveur du Taz,  mais ce dernier conseille quand même une péchara, un accord à l’amiable selon les clauses instaurées par le Chvout Yaakov (vol.2, resp. 144). Moché sera tenu de donner  un tiers de la somme à David: 66 euros

Rav Réouven Cohen.