Question : Une communauté a loué les services de Rav Chay pour sonner le chofar de roch hachana mais celui-ci n’a pas réussi à sortir des sons cachers et les fidèles n’ont pas pu se rendre quitte de la mitsva.  Chay ne comprend pas ce qui s’est passé parce qu’il a l’habitude de sonner depuis de nombreuses années et il ne manque pas de témoins à cela. Il avance pour sa défense que le chofar est une mitsva et apparemment le mérite de la kéhila n’était pas suffisant. Lui revient-il un quelconque paiement pour ses efforts?
Réponse : le beth dine a vérifié auprès de spécialistes. On peut évaluer à 10 pour cent le taux d’erreur possible même pour un professionnel, mais pas d’avantage. Il est primordial de se préparer au moins un mois avant et certains le font tout au courant de l’année afin d’arriver complètement à l’aise devant le public.
En vertu de cela, il nous est permis d’affirmer que selon toute logique Rav Chay ne s’est pas préparé suffisamment auparavant même s’il est un professionnel. Rav Chay a aussi peut-être été trop impressionné par quelqu’un ou quelque chose ce jour-là ou peut-être était-il trop fatigué.
D’autre part, en matière de halakha on ne prend pas en compte sa plaidoirie incombant la faute au public qui n’a pas été méritant etc. Mais il faut savoir que même s’il avait eu un empêchement de l’ordre du ‘’oness’’, force majeur, cela n’aurait pas obligé la communauté à lui régler quoi que ce soit car comme le stipule le Talmud (baba métsia 75 b voir Rama 334 ; 2) des ouvriers venus arrosé et travaillé un champ et la pluie étant tombée juste avant leur venue, ils n’ont pas pu et du travaillé, leur employeur ne leur doit rien. En effet, la règle est qu’un cas de force majeur que l’employeur ne pouvait imaginer est toujours au détriment des ouvriers.
Nétivote hamichpat 335, 3 va plus loin dans le cas du “oness” d’une cessation de travail par  empêchement majeur et involontaire de la part d’un ouvrier. Il écrit en effet, que l’employeur ne devra dédommager l’employé en aucune forme et même pour une partie de la journée passée à travailler quand ce travail n’a pas été fini et n’a fourni aucun bénéfice. Ceci n’est bien sûr pas le cas quand le travail a été fait à moitié et qu’il servira de base au prochain ouvrier. La communauté ne doit donc rien à rav Chay.
Rav Hayim Vidal

TRIBUNAL RABBINIQUE POUR PUBLIC FRANCOPHONE
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neigeQuestion : Pendant la dernière tempête  à Jérusalem, comme beaucoup d’arbres alourdis par tant de poids des neiges, celui d’Israël est tombé et a atterri dans le jardin de son voisin, Emmanuel. Ce dernier lui a bien sûr demandé de déblayer son gazon et aussi de le dédommager pour les dégâts occasionnés par la chute. Israël lui répond qu’il ne se sent pas coupable des dégâts puisque cet arbre a toujours été entretenu par ses soins et qu’il était donc valide. S’il est tombé, c’est à cause des intempéries et non sa faute. Pour ce qui est du déblaiement, il considère l’arbre comme ‘’hefker’’, comme n’étant plus sa possession et donc cela ne lui incombe pas.

Réponse : Israël a raison en ce qui concerne les dégâts provoqués par la chute. Il peut s’appuyer sur la Tosefta (Baba métsia 11; 5) rapportée par Beth Yossef (416) : ‘’Si un mur tombe à cause d’un tremblement de terre, du vent ou des pluies, s’il a été construit selon les règles le propriétaire est exempt sinon il devra en subir les frais’’. Si ce que prétend Israël est vrai, à savoir que l’arbre était en bonne santé, il est donc exempté de tout frais.
Quant au déblaiement, la michna (baba métsia 117) stipule : ‘’ celui dont le mur attenant au jardin de son ami est tombé, et que le voisin lui demande de déblayer les pierres, s’il lui répond : ‘’elles te reviennent’’ on ne l’écoutera pas’’.  Selon les Tossafote, on ne pourra appliquer ici la règle bien connue selon laquelle un objet tombé sans intention et dont le propriétaire n’en veut pas, peut être abandonné. Et ce, parce que les pierres ont une valeur et leur propriétaire veut surement les récupérer. En disant ‘’elles te reviennent’’, il fait preuve de paresse et veut se laisser le temps de faire les choses à son rythme etc.
Dans notre cas selon les Tossafote, l’arbre n’a aucune valeur pour les citadins, il ne le veut surement pas et il est donc sincère quand il dit le rendre ‘’hefker’’ à la disposition de tous. Israël est en donc en droit de se décharger du déblaiement.
Mais l’avis des Tossafote n’est pas retenu par la halakha car on fera une différence entre laisser ce qui est tombé sans intention dans un domaine public ou privé. (Tossafote haRoch, rachach, Kos Yéchouot, hazon ich baba batra 16;14). Puisqu’il s’agit du jardin d’Emmanuel, un domaine privé, Israël devra se charger du déblaiement.

Rav Reouven Cohen

voiture_accidenteePour se rendre chez ses parents le chabbat, Michaël a emprunté la voiture de Chimone sans faire de constat. Ils ont juste convenu qu’à la fin du chabbat, Michael ramènerait la voiture au parking de Chimone. Dimanche matin, Chimone téléphone à Michaël et se plaint d’un coup sur la carrosserie. Michaël lui assure qu’il n’a eu aucun accrochage et que cela aurait pu se passer pendant chabbat ou chez Chimone, avant ou après l’emprunt. Mais Chimone écarte la dernière hypothèse car il n’y a aucune possibilité d’accrochage dans son parking. Qui est responsable de payer ce dégât ?

Réponse : N’ayant pas fait de constat de bon état au moment de l’emprunt de la voiture et à son retour, Chimone ne pourra pas imputer à Michael les frais de réparation de la carrosserie.

Développement : même si la possibilité d’un accrochage dans la place de parking est écartée, Chimone ne garantit pas que le coup n’était pas déjà là au moment de l’emprunt. De toute façon, sans constat, Michael n’est pas obligé de le croire. Quelle attitude doit-on adopter devant ce doute ? Le Choul’han Aroukh (224 ; 2) cite un cas similaire à propos d’une bête, acquise par un boucher, dont les poumons contenaient une aiguille. Elle est donc téréfa et impropre à la consommation. Le boucher réclame donc son argent au vendeur. Dans ce cas, la règle est que l’on établit la datation d’un événement survenu à un moment inconnu selon la dernière situation de l’objet. Puisque la bête se trouvait en dernier lieu chez le boucher, on présume que sa blessure a eu lieu chez lui.

A priori, telle sera la règle pour la voiture. L’incident n’ayant pas pu se passer après le retour de la voiture étant donné qu’il n’y a pas d’accrochage possible au parking de Chimone, nous devrons établir que l’événement est survenu chez Michael – le dernier endroit où était la voiture – et pas avant l’emprunt. Michaël devra donc endosser les frais de réparation puisque la voiture était chez lui en dernier.

Cependant, il faut savoir que les Tossafot (Nida 51a) font la différence entre un emprunt et une vente. Le Avné Nézer (Evéne Ha’ézer 21) explique que cette règle énoncée par le Choul’hane Aroukh consiste à garder le statut de l’objet jusqu’à preuve du contraire. Supposer que le vice était déjà chez le vendeur, c’est changer l’identité du propriétaire de la bête en annulant la vente pour cause de vice caché. On suppose donc que l’accident s’est produit dans le domaine de celui chez lequel on a découvert le vice.

Dans le cas d’un emprunt, il n’est pas question d’annuler la transaction mais simplement d’obliger l’emprunteur à payer la réparation du dégât. Etablir la datation de l’événement selon la dernière situation, comme dans le cas de la vache blessée, c’est au contraire changer le statut de Michael de patour à ‘hayav (de dispensé à responsable). Jusqu’à preuve du contraire, Michael continuera à être patour, dispensé de payer.

Pour être couvert, Chimone aurait dû faire un constat de bon état au moment de l’emprunt de la voiture et à son retour.

Rav Réouven Cohen

cadeauQuestion : Les élèves d’une classe décident d’offrir un cadeau à leur professeur et remettent de l’argent à Chimon pour qu’il achète une bouteille de bon vin. Chimon voit que le magasin propose en promotion un cadeau de six verres pour l’achat d’une bouteille de vin. Après avoir acheté la bouteille, Chimon reçoit les verres. A qui appartiennent ces verres ? A Chimon ou à toute la classe ?
Réponse : « Si le prix était fixé et connu, et que [le marchand] a donné davantage à l’envoyé en quantité, en poids ou en mesure, ce supplément appartient aux deux et l’envoyé doit partager ce supplément avec le propriétaire de l’argent [qui l’a envoyé faire cet achat] » (Choul’hane Aroukh ‘Hochène Michpat 183.6). La source de cette loi est la Guemara (Kétoubot 98b) disant au nom de Rabbi Yossei que quand un prix est déterminé, l’envoyé (qui effectue l’achat) et l’envoyeur (qui donne l’argent) partagent le supplément offert. Selon le Rif, ce supplément appartient entièrement à l’envoyé, mais puisque ce profit lui parvient grâce à l’argent de l’envoyeur, nos Sages disent que le supplément doit être partagé entre eux deux. Tel est aussi l’avis de du Roch et de l’auteur du Itour. Toutefois, Rachi explique que le supplément doit être partagé parce qu’il y a un doute de savoir si le marchand voulait faire ce cadeau à l’envoyé ou à l’envoyeur. D’après cette opinion, si le marchand dit explicitement qu’il donne ce cadeau à l’envoyé, il appartient à l’envoyé, contrairement à l’opinion du Rif (comme le dit le Ran).
Le Rama tranche : « Si le marchand dit clairement qu’il donne [ce supplément] à l’envoyé, il appartient entièrement à l’envoyé », en accord avec l’opinion de Rachi. Par contre, le Chakh écrit qu’il faut suivre l’opinion du Rif. Le Taz et le Nétivot aussi ont des objections à l’explication de Rachi. A priori, dans notre cas, il semble que selon les deux opinions, l’envoyé (Chimon) et l’envoyeur (la classe) doivent partager le cadeau (les verres) – d’après Rachi à cause du doute, et d’après le Rif parce qu’il est donné à l’envoyé, qui doit donner la moitié au propriétaire de l’argent.
Cependant, il semble que de nos jours, les offres faites par les magasins ne sont absolument pas destinées au profit de l’envoyé (qui effectue l’achat) mais au profit de l’acheteur (qui possède l’argent). Elles ont pour seul but d’attirer ceux qui détiennent le pouvoir d’achat et sont donc toujours destinées aux propriétaires de l’argent. La Guemara et les Richonim cités plus haut parlent en fait d’un cadeau personnel fait à l’envoyé. Le Ketsot Ha’hochène (parag. 7) écrit : « Mais si le marchand donne [le cadeau] explicitement à l’envoyeur, même selon le Rif, il appartient entièrement à l’envoyeur, et l’envoyé n’a pas droit à une partie du cadeau pour son dérangement. En effet, il est impensable que si un homme envoie un cadeau à un ami par l’intermédiaire d’un envoyé, cet envoyé en prenne une part. »
Par conséquent, dans notre cas où les marchands donnent sans aucun doute le cadeau au client (et non à son envoyé), toutes les opinions sont d’accord qu’il appartient à l’envoyeur et que l’envoyé n’y a pas droit. Aussi, les six verres appartiennent à toute la classe, à moins que le cadeau ait été fait à Chimon en tant que membre du club des clients (et possesseur d’une carte privative), auquel cas il doit donner la moitié du cadeau au reste de la classe.
Rav Reouven Cohen