Moché a pris une location à Natanya pour Pessah. De Paris, il avait viré une avance à Ilan et il était entendu que l’appartement soit cacher pour Pessah et déjà vérifié, étant donné que Moché devait atterrir en Israël la veille de la fête. Mais quel ne fut pas son étonnement en trouvant à son arrivée à 9h du matin un appartement non nettoyé et présentant même quelques miettes de ‘hamets. Moché appelle de suite Ilan, qui s’excuse d’être très occupé par les préparatifs de Pessah et de n’avoir pas eu le temps de nettoyer l’appartement. Il propose à Moché de déduire 200 chéquels du prix de la location pour le nettoyage et la bedika qu’il doit faire. Moché est déçu et sa femme n’est pas prête à emménager dans un tel appartement la veille de la fête. Après quelques coups de fil, il réussit à trouver un autre appartement encore moins cher qui lui convient. Il avertit Ilan du changement et lui demande de lui rembourser ses arrhes. Pour sa part, Ilan lui demande de payer la totalité de la location puisqu’il ne trouvera plus de locataire à cause de lui et que, de toutes façons, il s’est engagé à louer l’appartement pour toute la durée de la fête.
Réponse : les biens immobiliers s’acquièrent par l’argent (Kidouchine 26). Il en est de même pour la location immobilière : en payant une avance, Moché a acquis la location pour toute la période ce qui l’oblige à payer la totalité de la somme même s’il n’occupe pas les lieux. Telle est la loi sauf s’il y a un défaut ou une condition qui remettrait en question l’accord initial. Le Choul’han Aroukh (Ora’h ‘Haim 437 ; 3) écrit que celui qui loue le 14 Nissan une maison, qui est censée être vérifiée et s’avère non vérifiée, le locataire devra faire la bedika et ce n’est pas considéré comme un vice qui annule la location. La Guemara (Pessa’him 4b) explique que même s’il est coutume de faire payer la bedikat ‘hamets, la location ne sera pas annulée, car chacun est content de faire lui-même la mitsva, même s’il incombe au propriétaire de la faire. Le Maguen Avraham (idem 7) demande pourquoi il faut évoquer cette raison pour la mitsva. Le Choul’hane Aroukh (‘Hochen Michpat 232) n’a-t-il pas établi qu’un vice extérieur oblige réparation mais n’annule pas la transaction ? Le Maguen Avraham répond que même si l’on a fait la condition explicite que la bedika soit effectuée, la location sera maintenue pour la raison de la mitsva. Cet avis a été retenu par Rabbi Akiva Eiguer et le Ma’hané Ephrayim (onaa 6), mais plusieurs poskim l’ont remis en question (Pri ‘Hadach, Mékor ‘Haïm 7). En effet, il est difficile de dire qu’une condition explicite ne suspend pas la location. Mais il semble que dans notre cas, la location est annulée selon tous les avis. En effet, lorsqu’il est entendu que la maison louée soit cacher pour Pessah, il ne s’agit pas uniquement de la mitsva de bedika qui ne dure pas très longtemps, mais du nettoyage à fond de tout l’appartement. De nos jours, ce travail est perçu comme un grand tracas, ce qui fait d’ailleurs le bonheur des organisateurs d’hôtels qui permettent aux ménagères d’éviter cette charge qu’elles considèrent comme lourde. Bien que la halakha déconseille de se dispenser de la bedika, nous savons très bien pourquoi tant de familles quittent leur maison pour la fête de Pessah. De nos jours, il n’y a donc plus pour cette mitsva le principe de la Guemara qu’une personne est contente de faire une mitsva par elle-même. Le Rambam (Mékhira 15 ; 5) écrit que chaque milieu établit ce qui est considéré comme un vice susceptible d’annuler une transaction. C’est ce que déclare l’un des grands décisionnaires contemporains, Rav Naftali Nussbaum chlita. Dans notre cas, puisque personne ne serait d’accord de nettoyer et de faire la bedika d’un appartement loué, Ilan doit effectuer le nettoyage et la bedika à ses frais, sans quoi la location sera annulée.
Conclusion : si Ilan ne propose pas à Moché de nettoyer immédiatement l’appartement, Moché peut quitter cette maison et Ilan devra lui rembourser les arrhes qu’il a avancées.
Rav Réouven Cohen

Une location à Pessah