Sammy, toujours très occupé, s’est rendu compte la veille des fêtes de Souccot qu’il n’avait pas encore acheté son Etrog. Il courut donc chez son vendeur habituel pour s’en procurer un. En arrivant à la boutique, Sammy fut surpris de voir qu’il n’était pas le seul à chercher un Etrog à la dernière minute. Plutôt que d’attendre son tour derrière les nombreux clients, Sammy décida d’emporter l’un des Etroguim de l’étalage et de quitter le magasin, pensant revenir plus tard pour régler son dû. Mais après Souccot, Sammy eut une idée: il se rendit chez le vendeur et lui dit : « Sache que la veille de Souccot, je t’ai pris un Etrog sans permission et je pensais te le payer par la suite, mais aujourd’hui j’ai pensé effectuer le remboursement en te rendant ce même Etrog ». Outré, le vendeur lui répondit clairement qu’il n’en était pas question et que s’il avait pris un Etrog de la boutique, il devait lui donner sa valeur en monnaie, soit 50 Euros. Sammy décida donc d’appeler un Dayan pour savoir ce qu’il devait faire.

Réponse : Avant même de traiter le problème du remboursement, le Dayan fit comprendre à Sammy que son acte était inadmissible : prendre un objet appartenant à son prochain, ou même à un magasin, sans en avoir l’autorisation explicite est considéré comme du vol, quand bien même on aurait l’intention de le payer par la suite, comme le dit le Choul’han Aroukh (348, 1). Qui plus est, pendant Souccot, son Etrog était considéré comme un Etrog volé et Sammy ne s’est donc pas acquitté de cette Mitsva durant la fête.

En ce qui concerne le remboursement, étant donné qu’on considère que Sammy a commis un ‘vol’ et pas un ‘achat’, il pourrait restituer l’objet volé et pas sa valeur. Ainsi, une Michna (Baba Kama 9, 2) nous enseigne que celui qui vole un morceau de pain avant Pessa’h pourra s’acquitter de son obligation de rendre l’objet volé en rendant ce même morceau de pain après Pessah, bien que tout le monde sache qu’il est interdit de consommer du pain qui appartenait à un Juif pendant Pessah. Cependant, comme on ne peut constater de ses yeux que ce pain est devenu impropre à la consommation, on pourra l’utiliser pour restituer le vol. Cette Halakha a été ainsi rapportée dans le Choul’han Aroukh (363, 1).

A priori, on pourrait en déduire qu’il en est de même pour l’Etrog que Sammy doit rendre : bien qu’aujourd’hui, cet Etrog ne vaille pas plus d’un ou deux Euros, puisqu’aucun changement de valeur n’est visible à l’œil nu, Sammy devrait pouvoir s’acquitter en rendant l’Etrog.

Pourtant, le Beth Chmouel Aharon (‘Hochen Michpat ch. 5) écrit qu’il y a une différence fondamentale entre le ‘Hamets et l’Etrog. En effet, bien que l’interdit du ‘Hamets soit connu par tout le monde, on ne peut pas remarquer sur un morceau de pain qu’il se trouvait pendant Pessa’h dans la propriété d’un juif et donc, aucune personne étrangère ne pourra deviner que ce pain ne vaut plus rien étant donné qu’il est impropre à la consommation. Par contre, tout le monde sait bien qu’un Etrog après les fêtes de Souccot ne vaut plus que quelques Euros ; quiconque voit un Etrog le lendemain de la fête voit en lui une valeur nettement diminuée. On ne peut donc pas appeler cela « un dommage non-décelable à l’œil nu ». Le Pit’héi Techouva (363,1) rapporte cette décision du Beth Chmouel Aharon.

En conclusion : Sammy ne pourra rembourser son vol en restituant l’Etrog au vendeur, mais devra lui rendre sa valeur initiale, soit 50 Euros.

Rav Itshak Bellahsen     

La restitution d’un Etrog