Une prestation de services est rémunérée
Youval doit rapidement vendre sa maison à Ashdod, qu’il évalue à 5 millions de chequels. Quand Ouri lui propose ses services d’agent immobilier, Youval lui répond : « Je dois obtenir 5 millions de shequels. Tout ce que tu arriveras à toucher de plus sera pour toi ». Au bout d’une semaine, Ouri fait visiter la maison à un client. Celui-ci propose sur place 5 millions à Youval. Ouri demande à Youval d’être ferme sur 5,2 M dans l’espoir de clôturer à 5,1 M, afin de toucher 100,000 shequels de commission. Youval est impatient, appelle le client et conclut directement avec lui à 5 M. Mécontent, Ouri accuse Youval de lui avoir escamoté sa commission et lui demande de payer. Pour sa part, Youval répond : « Je t’avais averti que pour 5 M, je ne te payerai pas et je ne voulais pas manquer ce client ». Ils se rendent au beth dine pour régler ce litige à l’amiable.
Réponse : l’agent immobilier mérite salaire pour deux raisons : s’il a été mandaté, il doit recevoir un salaire au même titre qu’un employé et, s’il n’est pas mandaté, il a droit à un salaire pour le profit généré au vendeur ou à l’acheteur. Il existe une controverse (voir Pit’hei Techouva ‘Hochen Michpat 264 qui rapporte le Peri Tévoua) à savoir s’il doit malgré tout être payé dans le cas où le vendeur dit clairement à l’agent qu’il n’est pas intéressé par ses services. Mais notre cas est différent : Youval a demandé à Ouri de travailler et de prendre son salaire sur l’excédent des 5M. Ouri n’a pas renoncé à son salaire. Il a uniquement accepté de prendre le risque, en évaluant qu’il serait capable de trouver un client qui proposera davantage que 5M et d’obtenir sa commission de cette façon. Mais si Youval ne lui laisse pas la possibilité de toucher son salaire de la façon convenue, Ouri n’est pas d’accord d’y renoncer. On se trouve donc face à un employé auquel on a demandé de travailler sans fixer de salaire (puisque le salaire fixé a été annulé). Dans ce cas, il faudra lui payer le salaire habituel d’un agent immobilier en pourcentage. Mais ceci est juste uniquement si Youval s’est empressé de conclure sans laisser la possibilité à Ouri de monter le prix. Par contre, s’il lui a laissé tout le temps nécessaire et que le client n’a pas accepté de payer davantage, Youval aurait eu raison de clôturer de peur de manquer ce client. En cas de doute, on ne pourra pas obliger Youval à payer en vertu de la règle de « hamotsi méhavéro alav haraya » : celui qui retire de l’argent à l’autre doit fournir la preuve qu’il a raison. Mais si l’agent est persuadé qu’il aurait réussi à faire monter le prix et que le vendeur n’en est pas sûr, ce serait un cas de « eini yodéa im pératikha » (Choul’han Aroukh ‘Hochen Michpat 75 ;9) : l’emprunteur disant ne pas être sûr d’avoir remboursé sera tenu de payer sa dette puisque, jusqu’à preuve du contraire, il était redevable.
En conclusion : si l’agent n’a pas réussi à faire monter le prix malgré tout le temps dont il disposait, Youval ne lui doit rien. Mais si Youval s’est empressé de conclure l’affaire sans laisser à Ouri la possibilité de gérer les pourparlers pour hausser le prix (raison de plus si l’acheteur avait été d’accord d’augmenter son offre), Youval devra payer le pourcentage habituel accordé à un agent immobilier.
Rav Réouven Cohen